FINANCEMENT DE LA SECU & CANCER DES JEUNES

Publié le par sceptix


Des pistes pour le financement
PAR Jean-Baptiste Quiot, Thierry Brun
jeudi 3 juillet 2008
 
Face au déficit 2008 de l’assurance maladie, évalué à 4,1 milliards d’euros, le gouvernement prévoit un plan d’économies. Pourtant, des moyens de financement existent.

Comme chaque année à la même période, le déficit de la Sécurité sociale est l’objet de toutes les attentions. Évalué à 4,1 milliards d’euros pour 2008, celui de la branche maladie est le principal levier politique utilisé par le gouvernement pour prôner des économies et adopter des mesures réduisant l’accès à l’assurance maladie collective. D’où le ballon d’essai lancé le 24 juin par le directeur de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam), Frédéric Van Roekeghem. Dans un entretien accordé au quotidien les Échos, il a présenté un plan d’économies de plus de 3 milliards d’euros, dont un volet sur les affections de longue durée (ALD : cancer, diabète, sida, etc.), aux conséquences néfastes pour les plus modestes. L’hypothèse d’une baisse de la prise en charge de ces ALD, désormais exclue du plan d’économies, a permis de voir jusqu’où le gouvernement peut aller dans les mesures restreignant l’accès aux soins. Il devrait ainsi se prononcer à la mi-juillet sur l’ensemble du dispositif d’économies dans le cadre de la préparation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2009. Il n’en demeure pas moins que la réforme des ALD, qui concentrent plus de 60 % des dépenses de l’assurance maladie, est dans les tuyaux du gouvernement. Cette logique comptable de court terme met à mal un système de santé fondé sur la solidarité, alors que d’autres choix sont possibles.

Les médicaments représentent le principal poste de dépense de la Sécurité sociale. Leguerre/AFP

Baisser les prix des médicaments

La question des médicaments est capitale, puisque ces derniers représentent le principal poste de dépense de la Sécurité sociale. Pourtant, le plan développe toujours la même piste : le déremboursement. Dans un premier temps, le plan envisageait de ne plus rembourser qu’au taux normal de 35 % les médicaments à vignette bleue actuellement pris en charge à 100 % pour les personnes en ALD. Cette proposition, même si elle a été retirée, est révélatrice d’une certaine logique. « Ces mesures s’inscrivent dans la logique des franchises, qui visent à faire payer les malades pour leur maladie », juge l’Union syndicale Solidaires. Selon l’auteur de Comment sauver (vraiment) la sécu ?, Philippe Pignarre, « les prix des nouveaux médicaments devraient être indexés sur le bénéfice thérapeutique qu’ils apportent par rapport à ceux plus anciens ». Or, aujourd’hui, ce n’est pas le cas. « Les nouveaux médicaments coûtent jusqu’à dix fois plus cher que les anciens, alors qu’ils ne sont pas beaucoup plus efficaces », explique-t-il. Comment expliquer cette aberration ? « Actuellement, les prix sont fixés lors de négociations secrètes entre les firmes pharmaceutiques et l’État », relève Philippe Pignarre, qui préconise, « des discussions publiques et transparentes sur les prix avec l’objectif de primer les grandes innovations ». Avec des médicaments dix fois moins chers, nul doute que le déficit serait alors de moindre envergure. D’autant plus que «  la France est le pays européen qui consomme le plus de médicaments », note Philippe Pignarre. Mais « depuis 1995, la France est également le premier pays producteur de médicaments de l’Union européenne », selon l’association LEEM, qui regroupe les firmes pharmaceutiques. Or « les médicaments remboursables représentaient 74 % du chiffre d’affaires en France » en 2007, poursuit-elle. Alors, sont-ce vraiment les malades qui profitent du « trou de la Sécu » ?

Arrêter la privatisation de l’hôpital

En voulant faire des économies sur le dos des hôpitaux publics, le plan de redressement de la Sécu poursuit la politique de casse du service public qui sévit depuis des années. Cela se traduit par des économies sur la masse salariale, des restructurations et des fermetures de services. « Les plans de redressement sont une méthode de privatisation du service public, et ce sont les patients qui en pâtissent les premiers », explique Vladimir Nieddu, de SUD-Santé. Pour que l’hôpital soit rentable, les malades doivent y rester le moins possible. Cette obsession de la rentabilité profite aux cliniques privées, « qui sont en totale incapacité de satisfaire les besoins de santé et qui fonctionnent pour le profit de leurs actionnaires », relève le syndicaliste. La « concurrence » entre privé et public est donc faussée d’avance. Les hôpitaux, qui doivent assurer des missions de service public, ne peuvent pas rivaliser. « On doit arrêter cette course à la performance, estime Catherine Mills, de la Fondation Copernic, auteur de Main basse sur l’assurance maladie (éditions Syllepse). Et supprimer la tarification à l’activité, qui se fait au détriment de la santé des patients. » Ce système de financement profite en effet clairement au secteur marchand. Même la Cour des comptes a dénoncé le siphonnage des budgets hospitaliers en 2006 par les cliniques privées, à hauteur de près de 200 millions d’euros. Ce manque de financement est à comparer aux 249 millions d’économies nouvelles pour l’hôpital que propose l’Uncam pour 2009 ! La privatisation coûte donc très cher. Et, à long terme, les expériences de privatisation aux États-Unis le montrent, elle entraîne une augmentation du coût global de la santé. « Les cliniques privées vivent de l’argent de l’assurance maladie, explique Vladimir Nieddu. Mais l’État aussi : il récupère une partie de l’argent grâce à la TVA. Il faut donc aussi supprimer la TVA pour les hôpitaux, dont les budgets sont consacrés à hauteur de 15 à 35 %, au matériel et aux frais de fonctionnement. »

Faire participer les revenus financiers et augmenter les salaires

Surprenant : pas un mot sur les cotisations sociales dans le plan de redressement. « Cette régression systématique des dépenses publiques, explique Catherine Mills, a pour objectif de faire monter la couverture privée. » La méthode est simple : culpabiliser les patients et dérembourser certains actes. « On définit strictement la maladie. Et ce qui n’est pas “strictement” la maladie, on ne le rembourse pas. Par exemple, les diabétiques ont des problèmes musculaires ou osseux. Ce n’est tout simplement plus considéré comme faisant partie de la maladie mais comme un problème de “confort”, poursuit-elle. Tout ça dans le but d’installer des cliniques privées grâce au financement public. Ce n’est pas simplement un petit plan d’économies, mais une transformation structurelle très grave. » Il existe pourtant des solutions pour financer un système public : par exemple, dégager des fonds grâce à de nouvelles cotisations sur les revenus financiers des entreprises. « On estime ces revenus, qui ne sont pas taxés, à 183 milliards par an. En les soumettant au même taux que les cotisations patronales classiques, on pourrait dégager 20 milliards d’euros par an pour la santé de tous, explique Catherine Mills. Une augmentation de 1 % de la masse salariale permettrait également d’augmenter de 2,5 milliards les rentrées de cotisations. Ce qui ferait 1 milliard de plus par an pour l’assurance maladie. » L’économiste Bernard Friot est du même avis : « La croissance des dépenses de santé peut être financée par une hausse du taux des cotisations maladie, donc des salaires. Le “déficit” est le produit du refus de cette hausse et de la volonté de laisser une place croissante à l’assurance maladie complémentaire. C’est ce déficit délibéré qui crée le problème, et il faut qu’il y ait problème, car comment réformer s’il n’y a pas de problème ? »

Lutter contre les causes réelles des maladies et favoriser la prévention

Le plan de redressement prévoit 415 millions d’euros d’économie au titre de la « maîtrise médicalisée ». « Si l’idée du médecin traitant est bonne au départ, elle sert surtout aujourd’hui à contrôler et à pénaliser les patients et les médecins qui ne suivent pas bien le parcours », explique Didier Ménard, du Syndicat de la médecine générale. Même constat pour les contrats individuels de prévention. « Il faut en effet favoriser le travail sur la prévention, poursuit-il. C’est-à-dire former les médecins à se préoccuper des causes des maladies et non pas seulement à faire de la réparation. En terme de santé publique et d’économie, c’est ce qu’il y a de plus rentable à long terme. » Mais la limite est floue entre prévention et contrôle. « Le gouvernement propose aux médecins d’être rémunérés pour faire de la prévention, mais c’est lui qui choisit les maladies et la méthode. Il exige ainsi que les patients s’engagent dans un contrat », relève Didier Ménard. En d’autres termes, le gouvernement veut soumettre le remboursement des soins à la responsabilité individuelle. « En conditionnant l’accès aux soins à des bons ou des mauvais comportements, on entre en fait dans le système de l’assurance privée, prévient-il. Le démantèlement de la Sécu se fait ainsi lentement mais sûrement. » Le gouvernement fait donc le choix de la culpabilisation du malade. Mais il existe d’autres solutions. « Le meilleur investissement à long terme est de lutter contre les vraies causes des maladies, explique Didier Ménard. C’est-à-dire la malbouffe, la pollution, le sport réservé aux riches et le stress au travail lié à l’exigence de rentabilité. Mais tout ça, c’est du business. Les cancers, par exemple, coûtent 15 milliards à l’assurance maladie mais rapportent 15 milliards aux laboratoires. Financer la santé, c’est donc d’abord s’attaquer aux lobbies industriels. »

Et pour le plaisir voici un commentaire à cet article :

1º piste : Que les médecins arretent pour un oui ou pour un non, de délivrer des arrets de travail farfelus comme c’est le cas en ce moment. Les arrets maladies de complaissances n’ont pas a etre une sorte de bonus aux congés payés annuellement. Les arrets maladies doivent etre uniquement réservés à ceux qui sont vraiment malades et non plus ........... aux faignants.

2º piste : Ne remboursser que les médicaments génériques bien moins chers et tout aussi efficaces (que ceux qui veullent la marque la paye integralement de leur poche)

3º piste : Obliger la sécu a limité ses frais de représentations et autres missions bidons ou les cadres et dirigeants passent plus des vacances dans des hotels et restaurants de luxes que des heures de travail.

4º piste : Dépénaliser totalement et sans complexe le droit des affaires, arreter les conroles inffamants dans les entreprises (URSSAF, Inspactions du Travail, etc ....) et laisser les patrons tranquilles de manière a ceux qu’ils bossent sans crainte et de ce fait, continuent a embaucher (et qui dis embauches, dit forcement nouvelles cotisations)

Vous en voullez d’autres de pistes pour sortir de l’engrenage de la faillite en France ?
- suppression du code du travail,
- encadrement strict des syndicats et du droit de greve avec service minimum,
- etc . etc .................

La France ne sortira du trou du déficit qu’avec un Patronat fort, tout autres solutions n’est que foutaise.

http://www.politis.fr/Des-pistes-pour-le-financement,4084.html
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La vie devant soi
PAR Mathilde Azerot
jeudi 3 juillet 2008
 
Troisième cause de mortalité chez les 15-24 ans, le cancer des jeunes ne bénéficie pas d’une prise en charge spécifique malgré son impact sur leurs relations, leur sexualité, leurs projets professionnels et personnels

Le cancer. Tout le monde sait qu’il y sera confronté au cours de son existence, de près ou de loin. Un homme sur deux en sera atteint et une femme sur trois, selon l’Institut national du cancer. Le mot a longtemps été entouré de silence, tant il renvoie à la vieillesse et à la mort. Aujourd’hui encore, l’association jeune et cancer reste quasi oxymorique : à 15 ou 20 ans, le cancer n’entre pas dans le champ des possibles. Pourtant, « le cancer est la troisième cause de mortalité chez les jeunes, juste derrière les accidents de la route et les suicides », rappelle Marie-Aude Sevaux, présidente de Jeunesse solidarité cancer (JSC). Une association qui vient de publier les témoignages de douze jeunes, âgés de 15 à 24 ans au moment où la maladie leur a été diagnostiquée. « Ce livre est né de l’envie et du besoin des jeunes et de leur famille de faire connaître cette réalité. » Près de 2 000 nouveaux cas sont détectés chaque année. Un quart en meurt.

 

« La seule référence que j’avais s’appelait Lance Armstrong », lance Benjamin, 31 ans, qui témoigne dans le livre. En 2000, en pleine préparation du Capes de philosophie, il apprend l’impensable : il est atteint d’un cancer des testicules. Il a 23 ans. Soigné à l’hôpital Cochin à Paris, il est pris en charge dans le service des adultes en compagnie de personnes âgées. « L’intérêt de ces témoignages, c’est de mettre l’accent sur la tranche d’âge : entre la prise en charge du cancer de l’enfant et celle de l’adulte, il faut reconnaître une spécificité au cancer des jeunes », estime le jeune homme, qui enseigne aujourd’hui la philosophie dans le secondaire. Une spécificité non encore reconnue : selon leur âge, les jeunes atteints sont traités soit en pédiatrie, soit dans les services pour adultes.

Comment partager sa maladie ? Camille a rejoint JSC en janvier 2007. « Pour la première fois, je pouvais rencontrer des personnes qui avaient eu la même chose que moi, au même âge, et qui avaient un autre rapport à la maladie », raconte-t-elle. L’année de ses 20 ans, après une période de grande fatigue longtemps attribuée à une déception amoureuse, les résultats de la biopsie tombent. « L’annonce a été assez froide, se souvient-elle, c’est seulement maintenant que je m’en rends compte. Le médecin m’a pris entre quatre yeux, toute seule, ma mère était restée dans la salle d’attente. Il m’a dit que j’avais la maladie d’Hodgkin, qu’il y avait deux types de traitement, et m’a fait la liste des effets secondaires. Il a ajouté qu’il faudrait peut-être envisager de faire ma licence de musicologie en deux ans. » L’attitude du personnel soignant est souvent vécue comme une violence supplémentaire au traumatisme lié à l’annonce de la maladie. Un choc d’autant plus cinglant pour ces adultes en devenir. Car la maladie n’a pas le même retentissement sur le développement social, psychique et affectif d’un adulte dont la vie personnelle et professionnelle est déjà bien établie que sur celui d’un adolescent en pleine construction identitaire, ou d’un jeune adulte qui goûte tout juste à l’indépendance et voit s’évanouir soudain ses projets. Les études et l’entrée dans la vie active, deux échéances par nature inquiétantes, se trouvent exacerbées avec l’épreuve de la maladie. Décidé, coûte que coûte, à passer son concours de philo, Benjamin a été contraint d’adapter son planning de révisions. « J’avais une temporalité à moi, je travaillais quand je pouvais », se souvient-il. Seul et en bibliothèque, au gré de l’énergie du moment. Une pugnacité qui lui a permis de vivre sa maladie mais surtout de se concevoir un avenir.

L’entrée dans l’âge adulte est aussi celui de l’épanouissement de la vie sexuelle. Un aspect fondamental entravé par la métamorphose d’un corps parfois devenu méconnaissable du fait des traitements et de leurs effets secondaires : perte des cheveux, fatigue, affaiblissement, amaigrissement… « Ils se sentent souvent indésirables, explique Gabrielle Marioni, psychologue en pédiatrie à l’Institut de cancérologie Gustave-Roussy. Ils ne reconnaissent plus leur corps, et la libido peut devenir inexistante. C’est toute la sexualité qui est brisée au moment où ils commençaient justement à avoir une vie sexuelle plus aboutie. » Camille a attendu sept ans avant de s’engager à nouveau dans une relation amoureuse. Quand les traitements s’achèvent, la période dite de rémission est une nouvelle épreuve : de nouvelles angoisses apparaissent, dont celle, constante, liée au risque de rechute. C’est le syndrome de Damoclès. Alors que son cancérologue s’était montré confiant, assurant que la récidive, pour le cancer des testicules, ne concernait que 1 % des cas, Benjamin a dû encaisser l’annonce d’un deuxième cancer, deux ans après le premier. « Même s’ils estiment que je suis guéri depuis un an, que je n’ai plus de visites de contrôle, je ne suis pas tranquille, je me méfie toujours », avoue-t-il. « L’après a sûrement été la période la plus douloureuse pour moi, confesse Camille, j’ai été fatiguée toute l’année qui a suivi, je me déplaçais lentement parce que je n’avais pas assez de globules rouges. Je pense que je devais être en état de choc, j’étais triste. » La lourdeur des traitements et les effets secondaires engendrés par les chimio et radiothérapies laissent parfois des séquelles irréversibles. Le spectre du cancer pèse sur l’avenir et réapparaît aux instants les plus intimes et les plus déterminants de l’existence. Particulièrement lorsque se pose la question de la parentalité. « Il y a deux ans, j’ai commencé à avoir des angoisses, à me dire qu’il était possible que je sois stérile, explique la jeune femme, aujourd’hui âgée de 30 ans. J’essaie de me raisonner. Je pense que c’est un passage obligé. » Complexe, voire douloureuse pendant la maladie, la relation aux autres est elle aussi bouleversée au moment de la guérison. L’entourage, également en souffrance, modifie souvent involontairement sa conduite vis-à-vis du convalescent, et l’environnement protecteur qui s’était créé autour du malade s’étiole. « Il fallait retrouver une vie normale, se souvient Camille, il n’était plus question de ma maladie, alors, je n’en parlais plus. » C’est sans doute l’une des raisons qui l’ont poussée à témoigner. « Ce livre m’a permis de dire la vérité, enfin, de me dire la vérité, rectifie-t-elle, que c’est légitime que ça me travaille toujours, dix ans après. Ce n’est pas forcément un problème, mais je l’avais longtemps considéré comme un problème à résoudre. » Réflexion que partage Benjamin. « Il y a quelque chose de thérapeutique dans le fait de témoigner, c’est à travers le récit qu’on trouve un sens aux choses. »

Jeunes Solidarité Cancer, Le cancer, c’est aussi l’histoire d’un cœur qui bat, éditions K’Noë, 2008, 15 euros. Livret « De main en main » sur le site www.jscforum.net.
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