Le gouvernement Colombien a-t-il menti ?
Pascual Serrano nous montre qu’il existe « des doutes sur le fait que l’armée colombienne a intercepté la libération pour la présenter comme un succès du gouvernement. Les FARC déjà avaient exprimé aux délégués européens avec lesquels ils s’étaient réunis leur volonté de libérer les rebelles ».
Bien que le Ministre de la Défense colombien, Juan Manuel Santos, ait présenté comme une brillante opération des service de renseignements militaires la libération d’Ingrid Betancourt et de quatorze autres prisonniers des FARC, la réalité est que cela s’est produit justement quand deux délégués européens, le français Noel Sáez et le suisse Jean Pierre Gontard, étaient entrés en contact avec la direction de la guerilla pour mettre en oeuvre la libération. Les FARC avaient déjà exprimé leur intention à cet égard et le gouvernement avait autorisé les contacts qu’il suivait de très près.
Le premier juillet dernier, un communiqué de l’Exécutif colombien, lu par le secrétaire de presse du palais présidentiel, César Mauricio Velásquez, signalait que deux émissaires européens « étaient entrés en Colombie au cours des derniers jours et avaient demandé au Gouvernement l’autorisation pour se déplacer en vue d’une rencontre directe avec le secrétariat (cúpula) des FARC, autorisation que le gouvernement a accordée ».
Le journal espagnol El País a également repris l’information le même premier juillet.
« Selon les médias colombiens, Bogotá a autorisé la réunion de deux négociateurs européens pour revoir les conditions pour de futures rencontres pour discuter le sort des prisonniers des FARC. L’ancien consul de France à Bogota, Noël Sáenz, et le diplomate suisse Jean-Pierre Gontard sont partis au début de la fin de la semaine passée jusqu’à un point de rencontre dans les montagnes que le gouvernement n’a pas facilité et ils auraient pu s’être déjà réunis là avec les membres du secrétariat de la guérilla, le principal organe de direction, y compris avec le nouveau dirigeant des FARC, Alonso Cano. »
Selon ce journal :
Les FARC se sont déclarés disposés à libérer 40 prisonniers, dont Bétancourt (elle a aussi la nationalité française), trois étasuniens ainsi que d’autres politiciens, policiers et membres de l’Armée colombienne, en échange de prés de 500 guérilleros prisonniers. Parmi les prisonniers que les FARC souhaitent voir libérer, il y a trois extradés aux Etats-Unis. Parmi eux, Ricardo Ovidio Palmera dit "Simón Trinidad".
Selon le journal français Le Figaro, l’émissaire français Noel Sáez et le suisse Jean-Pierre Gontard s’étaient réunis lundi dernier dans la jungle colombienne avec une personne proche du nouveau chef des Fuerzas Armadas Revolucionarias de Colombia (Farc), Alfonso Cano.
Déjà deux semaines auparavent, des sources proches de l’Elysée avaient indiqué que la France avait établi avec succés un contact avec le nouveau secrétaire des FARC, même si l’ambassadeur français en Colombie l’avait démenti alors.
En Colombie, le journal El Tiempo, proche du gouvernement, a reconnu que deux délégués internationaux avaient pu se réunir avec Alfonso Cano :
Les chargés de mission sont le français Noel Saez et le suisse Jean Pierre Gontard, autorisés par le Gouvernement pour la négociation avec le groupe rebelle dans la recherche de la libération des prisonniers.
Une source de Casa de Nariño a confirmé que « depuis trois jours les deux européens avaient entamé les actions pour concrétiser la rencontre » dans une zone non déterminée.
La même source n’avait pas écarté la possibilité que la réunion ait eu lieu avec le chef guérillero qui avait remplacé Manuel Marulanda Vélez dit "Tirofijo", qui est mort au mois de mars dernier.
Ceci signifierait que les voies de communication des FARC, pratiquement fermés depuis la mort de Raúl Reyes, le premier mars dernier, ont commencer à s’ouvrir de nouveau.
Le Gouvernement a donné des garanties.
"Le gouvernement a garanti aux deux négociateurs de faciliter leurs contacts. Ils leur donnèrent les facilités pour que la réunion soit un succès » précisa le fonctionnaire.
De la même source de la Casa de Nariño, on a appris aussi que les deux diplomates allaient demander aux FARC d’accepter la proposition d’une zone de rencontre pour entamer des discussions autour d’un éventuel échange humanitaire.
La version du gouvernement colombien sur la libération est que les militaires infiltrés dans la guérilla avaient trompé le commandant César des FARC en l’incitant à regrouper les otages et les faire monter dans un hélicoptère qui en fait était celui de l’Armée camouflé, faisant croire au commandant guérillero qu’ils se rendaient là où ils rencontreraient Alfonso Cano, le plus haut chef des FARC. Le doute qui germe sur cette version est de savoir si les guerilleros qui surveillaient les prisonniers avaient déjà reçu des consignes sur l’imminence d’une libération, ce qui expliquerait leur collaboration si naive à une transaction si suspecte. Ou jusqu’à quel point la libération avait déjà fait l’objet d’un accord entre la direction des FARC et les médiateurs envoyés par la France et, au dernier moment, l’armée colombienne a intercepté la libération pour la présenter comme une opération militaire victorieuse.
En réalité, il s’agirait d’une opération similaire à ce qui s’est passé lors du bombardement du campement de Raúl Reyes en Equateur. Dans le premier cas, le gouvernement colombien a vu que la libération était en cours et a préféré éliminer militairement les porte-paroles de la guérillera quitte à faire capoter la libération, tandis que dans ce cas-ci, ils ont intercepté l’opération en pilotant eux-même la libération pour la présenter comme un succés exclusivement militaire et gouvernemental.