CRISE BOURSIERE DE 1929 - le "Glass-Steagall Act"

Publié le par sceptix

Glass-Steagall Act est le nom sous lequel est généralement connu le Banking Act de 1933 aux États-Unis. Celui-ci a :

  • instauré une incompatibilité entre les métiers de
     banque de dépôt et de banque d'investissement;
  • créé le système fédéral d'assurance des dépôts bancaires;
  • introduit le plafonnement des taux d'intérêt sur les dépôts bancaires
    (la Regulation Q).

Il tient son nom d'un Sénateur démocrate de Virginie, Carter Glass, ancien Secrétaire au Trésor, et d'un Représentant démocrate de l'Alabama, Henry B. Steagall, président de la Commission Banque et Monnaie de la Chambre des Représentants.

Battu en brêche depuis le milieu des années 1970 et largement contourné par l'ensemble de la profession bancaire, il a finalement été abrogé le 12 novembre 1999 par le Financial Services Modernization Act, dit Gramm-Leach-Bliley Act,
 juste à temps pour permettre la fusion constitutive de
Citigroup.

Contexte historique

La crise boursière d'octobre 1929 a provoqué nombre de paniques chez les déposants qui, à tort ou à raison, craignaient que la banque de dépôt où ils avaient leur compte ait essuyé de lourdes pertes spéculatives sur le marché des actions.
 Comme l'industrie bancaire était alors très morcelée, ces paniques et les retraits massifs qui en découlaient ont finalement causé des milliers de faillites bancaires en chaîne.

Schématiquement, deux grandes options s'offraient alors au législateur :

  • forcer une concentration des banques en quelques grands groupes solides et diversifiés;
  • ou au contraire, organiser la protection de l'industrie bancaire en l'état, en la laissant morcelée.

Le contexte politique va trancher assez vite. En 1933, un jeune procureur, conseiller auprès de la Commission des Affaires Monétaires et Finances du Sénat américain, Ferdinand Pecora, conduit devant ladite Commission des auditions très violentes et spectaculaires de dirigeants de banques sur leur rôle détestable dans le krach. Il fait enfin basculer l'opinion en faveur d'une limitation du rôle des banques.

Séparation des métiers bancaires

Le Glass-Steagall Act distingue deux métiers bancaires :

  • la banque de dépôt (commercial banking, en anglais), c'est-à-dire les activités de prêts et de dépôts,
  • la banque d'investissement (investment banking, en anglais), c'est-à-dire les opérations sur titres et valeurs mobilières,

et les déclare désormais incompatibles. Les banques existantes doivent choisir d'abandonner l'un des deux métiers.

Les conséquences structurelles

JP Morgan choisit la banque commerciale, mais des dirigeants mécontents de ce choix quittent l'établissement et fondent la banque d'investissement Morgan Stanley.
Lehman Brothers ferme ses activités bancaires, ne restant que maison de titres,
tandis que
Chase et City toutes deux abandonnent les marchés financiers.

Le paysage bancaire américain va donc se polariser et cette législation va en fait faire émerger des banques d'investissement de très grande taille mais qui n'ont pas la surface financière que donnerait leur adossement à une grande banque de dépôts.

Par ailleurs, il a contribué à limiter de facto la taille des groupes bancaires américains. Malgré la taille de l'économie américaine,
jusqu'à la fin du XXe siècle, les plus grandes banques de la planète seront, sans efforts particuliers, japonaises ou européennes.

Remise en cause pour
« inadaptation à la croissance des marchés financiers »

Or les marchés financiers vont connaître un développement spectaculaire à la suite :

Ces évolutions fragilisent le steagall-act et le privent de pertinence.

Tandis que les banques commerciales, via certains artifices comptables et juridiques, et surtout via la création de filiales à l'étranger,
en particulier à
Londres, participent pleinement à la croissance des marchés financiers,
les banques d'investissement se trouvent, elles, de plus en plus sous-capitalisées.


Tout cela fragilise donc le système financier.
Par ailleurs, il le délocalise et redonne vie à la City de Londres, dont il fait
durablement la première place financière du monde
.

La banque centrale américaine va tenter plusieurs fois d'assouplir le système
à partir de 1986, mais ce n'est que devant le lobby réclamant la légalisation de
la fusion géante entre City et Travellers que le Sénat américain se résoudra à
abolir ce dernier "vestige des années trente".

30 années plus tard, le système financier est déjà en miettes

La FDIC et le système fédéral d'assurance des dépôts bancaires

Continuant à favoriser la préservation d'un paysage bancaire morcelé,
le Glass-Steagall Act a également créé la Federal Deposit Insurance Corporation,
ou FDIC,
c'est-à-dire le système fédéral d'assurance des dépôts bancaires.

Portée par la suite jusqu'à 100.000 dollars, la garantie accordée aux déposants,
pour leur dépôt dans chaque banque, va encourager ceux-ci à placer leur argent
dans nombre d'établissements de petite taille.
Elle est ainsi indirectement à la source de la vague de faillites spectaculaires de nombreuses caisses d'épargne (Savings and Loans ou S&L) en
1989,
qui avaient été hasardeusement "déréglementées" en
1980-82
par l'Administration Reagan.

Voir aussi :

La Regulation Q

La Regulation Q plafonne le taux de rémunération des dépôts bancaires à terme.
 N'étant pas conçue pour un univers inflationniste,
elle a causé des déséquilibres importants dans le système financier américain
dans les années 1960 et 1970.
On lui doit l'essor original du marché de l'
Eurodollar et, là encore,
une part de l'importance de Londres comme place financière.

Elle a été abolie en 1980 par le
Depository Institutions Deregulation and Monetary Control Act.

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P
Très interessant ton article, plus qu'instructionneux, merci a toi. j'apprécie d'autant que j'aime comprendre les chosesPar contre j'ai bougé cette fenêtre de com sur la gauche afin de m'éviter la vue de de ces 2 sieurs dont je ne n'ai vraiment aucune envie de me souvenir, ils sont déja bien assez présents dans mon casque !!!!
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G
Bonsoir Charlotte. Je m'excuse, mais je crois bien que la citation "Un peuple qui est prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité, ne mérite ni l'une ni l'autre..." est de Benjamin Franklin, et pas de Jefferson... Vérifie, mais je suis presuqe sur de mon fait.Sinon je glisse illico ton blog dans mes favoris !
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