Des «lots» de chômeurs pour engraisser le privé
Samedi, 28 Mars 2009
Le malheur des uns fait le bonheur des autres : on apprend que Pôle Emploi vient de publier un appel d'offres aux opérateurs privés pour le placement, sur deux ans, de 320.000 chômeurs. Un juteux marché en pleine expansion !
Cet appel, «organisé par région ou bassin d'emploi», se décompose en deux «lots» — vous noterez en passant l'expression vaguement bétaillère… — visant à «la prise en charge intensive et le placement» de 170.000 personnes éloignées de l'emploi (lot n°1) et à «l'accompagnement et le retour à l'emploi» de 150.000 licenciés économiques (lot n°2). Prévu pour deux années à compter du 1er juillet 2009, ce marché sera reconductible pour une année supplémentaire.
Déjà une aubaine pour nombre de patrons sans scrupules, la montée du chômage profitera aussi à d'autres. Actuellement, un «stock» annuel de quelque 40.000 demandeurs d'emploi est «suivi» par des cabinets privés employant des précaires boostés à la course aux chiffres. Peu avant la fusion, choisissant de leur ouvrir de nouvelles perspectives de profit sur le dos des cotisations sociales, le rapport Boulanger préconisait d'en tripler le recours : au delà de ses espérances, il sera quadruplé.
Bien que leurs résultats soient contestables et leur coût nettement plus élevé (en moyenne 4.000 € par chômeur contre 1.300 € pour le programme renforcé de l'ANPE), «les opérateurs privés de placement ne sont pas un sujet tabou à Pôle Emploi», estime son directeur général Christian Charpy, l'homme qui gagne plus que François Fillon et fait fi de la rigueur ambiante.
Détournement d'argent public
Pourtant, il y a moins d'un an, un rapport d'évaluation du ministère de l'Emploi remettait en cause leur supériorité et soulignait les performances du service public. On était en droit de penser que cette édifiante étude — qui, d'ailleurs, n'était pas la première du genre depuis 2005 — changerait la donne : que nenni ! Contre toute attente et malgré la situation financière de l'assurance-chômage, cet appel d'offres est lancé avant même que l'Ecole d'économie de Paris et le CREST ne livrent, en juin, leur deuxième rapport.
Ainsi, mesdames et messieurs, grâce à la réforme du service public de l'emploi initiée par Nicolas Sarkozy, le chômage est enfin un business légitimé ! Il y a bien volonté, au détriment de l'efficacité et du maintien d'un service public de qualité, d'engraisser les copains (par exemple, on rappelle que le fondateur d'Altedia, l'un des plus célèbres de ces cabinets de placement, n'est autre que Raymond Soubie, actuel «conseiller social» du président). Au lieu d'octroyer des moyens financiers et humains à Pôle Emploi, on préfère en claquer trois fois plus en direction du privé malgré des résultats connus, le tout à la charge de l'Unedic.
Dans la logique libérale, sur le dos d'une situation scandaleuse qu'elle a elle-même provoqué (car le chômage de masse et la précarisation du travail sont ses fruits, jalousement cultivés) existe toujours l'opportunité de créer un nouveau marché — artificiel, parasite et lucratif — avec l'assentiment d'un gouvernement qui n'a nullement l'intention de moraliser quoi que ce soit. Prochaine étape : la privatisation.
http://www.actuchomage.org/modules.php?op=modload&name=News&file=article&sid=4526
En attendant, à Pôle Emploi, des embauches insuffisantes |
Pôle Emploi réclamait près de 3.000 embauches pour faire face à ses nouvelles missions et à l'afflux de chômeurs. Il devrait n'en obtenir qu'un peu plus de 1.800. En janvier 100.400 chômeurs de plus, 79.900 en février, chaque mois donne un argument de plus à Christian Charpy, le directeur de Pôle Emploi, pour obtenir des effectifs supplémentaires. La question est sur la table depuis plusieurs semaines. Le 19 février, le conseil d'administration où siègent les partenaires sociaux avait exigé en urgence «un plan d'action précis» pour répondre à la «situation difficile» provoquée par l'afflux de chômeurs. Le 3 mars dernier, en déplacement à Dijon, le secrétaire d'Etat à l'Emploi Laurent Wauquiez s'était déclaré prêt «à mettre des effectifs en plus». Depuis, il a affirmé à plusieurs reprises que la décision interviendrait d'ici à la fin mars. L'Elysée aurait tranché cette semaine. Pôle Emploi réclamait un peu moins de 3.000 postes. Il devrait en obtenir un peu plus de 1.800 (équivalents temps plein). Les quelque 860 emplois destinés à lui permettre d'assurer les missions de suivi des chômeurs bénéficiant d'un contrat de transition professionnelle ou d'une convention de reclassement personnalisé n'ont pas fait débat. En revanche, seule la moitié des 2.000 postes environ demandés pour faire face à l'afflux de chômeurs aurait été accordée. Les postes supplémentaires viendront compléter une première (petite) vague d'embauches - 200 emplois - au dernier trimestre de 2008 pour faire face à l'afflux de chômeurs. Ils s'ajouteront aux 400 CDD programmés initialement pour remplacer les agents de l'ex-ANPE en formation sur les règles d'indemnisation et les agents de l'ex-Assedic en formation sur le placement des chômeurs. Par ailleurs, d'ici à la fin du premier semestre, quelque 800 personnes vont être embauchées en anticipation d'une bonne partie des 1.000 à 1.200 départs en retraite qui vont s'étaler sur 2009. A la fin février, Pôle Emploi employait 44.675 personnes dont 29.838 ex-agents de l'ANPE et 14.837 ex-agents des Assedics. (Source : Les Echos) |