L’économie se redresse-t-elle vraiment ou tout cela n’est-il que du battage médiatique ?

Publié le par sceptix

Signes de reprise ou descente aux enfers ?

Par Mike Whitney
CounterPunch, le 17 août 2009

article original"Green Shoots or Scorched Earth?"

L’économie se redresse-t-elle vraiment ou tout cela n’est-il que du battage médiatique ?

Voici ce que l’on sait. La FED ne baisse pas les taux d’intérêt à zéro à moins que la maison ne brûle et qu’elle doive frapper un grand coup. L’idée est d’inonder les marchés de liquidités afin d’éviter un effondrement financier total. C’est une manœuvre désespérée et la FED ne la prend pas à la légère.

La FED a initié, il y a huit mois (le 16 décembre 2008), sa politique de taux zéro (ZIRP - Zero Inrerest Rate Policy) et ne les a pas remontés depuis. Pendant ce temps, le président de la FED, Ben Bernanke, a injecté des sommes colossales dans le système financier, en utilisant des moyens non conventionnels et qui n’ont jamais été testés. Personne ne sait si Bernanke peut accroître ou non ses facilités de crédit multi-trillionnaires (et éviter une hyperinflation comme au Zimbabwe), parce que personne n’a jamais créé de programmes similaires. Toute cette politique est une véritable « navigation à vue ». Cependant, ce que nous savons vraiment est que la FED a l’intention de maintenir les taux au plus bas dans le futur prévisible, ce qui signifie que tous les voyants sont encore au rouge. Voici un extrait du compte-rendu de la Commission Fédérale au Marché Obligataire, qui s’est réunie mercredi dernier :

« La Commission maintiendra le taux directeur fédéral dans une fourchette comprise entre 0 et 0,25% et continuera d’anticiper que les conditions économiques garantiront probablement de faibles niveaux du taux directeur fédéral pendant une période prolongée. Ainsi qu’il avait été annoncé précédemment, pour apporter un soutien aux crédits hypothécaires et au marché de l’immobilier d’habitation, ainsi que pour améliorer les conditions sur les marchés du crédit privé, la Réserve Fédérale achètera, d’ici à la fin de l’année, un total de 1,25 trillions de dollars de titres adossés à des crédits hypothécaires (MBS - Mortgage Backed Securities) détenus par les agences et jusqu’à 200 milliards de dettes des agences. De plus, la Réserve Fédérale entre dans le processus d’achat de Bons du Trésor, pour un montant de 300 milliards de dollars. Pour encourager une transition en douceur sur les marchés lorsque ces achats auront été réalisés, la Commission a décidé de ralentir progressivement le rythme ce ces transactions et anticipe que la totalité de ces achats sera réalisée d’ici la fin du mois d’octobre. La Commission continuera d’évaluer le rythme et les montants totaux de ses achats de titres, à la lumière de l’évolution des perspectives économiques et des conditions sur les marchés financiers. La Réserve Fédérale surveille en permanence la taille et la composition de son bilan et ajustera ses programmes de crédit et de liquidité en fonction de la situation. »

Traduction : L’économie est toujours très éprouvée et la FED maintiendra les taux à zéro jusqu’à ce que la tempête passe. Bernanke continuera d’acheter des cargaisons de MBS provenant de Fannie [May] et de Freddie [Mac] pour éviter un déclin encore plus précipité du prix de l’immobilier d’habitation. La FED achètera également pour 300 milliards de Bons du Trésor (monétisation) dans un effort destiné à réamorcer la pompe et à maintenir les taux d’intérêt à long terme artificiellement bas. (Remarquez : La FED suspend son programme de monétisation – rachats de Bons du Trésor – uniquement parce que le dollar est tombé à un niveau de support dangereux, en dessous duquel se trouve l’abîme. Donc, l’annonce de Bernanke n’est pas un signe de confiance vis-à-vis d’un « redressement » fictif, mais la crainte d’une « consolidation désordonnée » du dollar.)

Tout compte fait, la déclaration de la FED est une expression de désespoir, pas d’optimisme. Bernanke n’aimerait rien de mieux que prouver à ses détracteurs qu’ils ont tort, en augmentant les taux et en coupant quelques facilités de crédit. Mais il n’a pas le choix. La situation est désespérée. Imaginez seulement ce que seraient les prix des maisons aujourd’hui si Bernanke n’avait pas acheté pour 1 trillion de dollars de titres adossés à des crédits hypothécaires ? L’immobilier se serait vautré encore plus.

La FED est en bataille rangée contre la déflation et elle perd rapidement du terrain. Si cela n’était pas vrai, alors Bernanke augmenterait tout simplement les taux d’intérêt de 50 points de base et récupèrerait une partie des liquidités excédentaires qu’il a balancé un peu partout. Mais il ne le peut pas, parce que s’il le faisait, les marchés des actions s’effondreraient de 500 points en un après-midi et le système financier serait renvoyé dans les cordes. Les liquidités de Bernanke sont les seules choses qui empêchent l’économie de disparaître dans un trou noir déflationniste.

L’économie est toujours sous respiration artificielle et le scénario des « signes de redressement » est pure fiction. Le système financier sera sous perfusion de la FED pour les années à venir. Peut-être pour toujours. Les choses ne vont pas mieux ; elles sont pires. Regardez les faits. Il y a eu 1,9 millions de saisies [de logements] au cours du premier semestre de 2009 et il y en aura encore 1,5 millions avant la fin de l’année. Est-ce une amélioration ?

Selon Bloomberg :

« Une surabondance de maisons invendues tire également les prix vers le bas. Il faudra, au rythme actuel des transactions, 9 mois et demi pour écouler les 3,8 millions de maisons qui étaient à vendre en juin (chiffres de l’Association Nationale des Agents Immobiliers). Le taux de rotation des stocks immobiliers a été en moyenne de 4 mois et demi entre 2000 et 2005… Plus de 18,7 millions de maisons familiales et de maisons de vacances à vendre, y compris les saisies, sont restées vacantes aux Etats-Unis au cours du deuxième trimestre… Les ventes totales de maisons ont chuté de 23,7% en juin 2009, par rapport à juin 2008. » (Bloomberg) Offre surgonflée, prix en baisse, saisies record, demande fléchissant – et, selon la Deutsche Bank - 48% de tous crédits les hypothécaires dépasseront la valeur de leur hypothèque d’ici 2011. Tout est noir.

Voici un autre extrait de Bloomberg, paru le 12 août :

« La chute des prix dans l’immobilier d’habitation s’est accélérée aux Etats-Unis au deuxième trimestre, baissant d’un montant record de 15,6% sur un an, alors que les saisies ont pesé sur la valeur.

« Le prix moyen d’une maison individuelle existante est tombé à 174.000 dollars, la plus forte baisse depuis que cette statistique existe (1979), a déclaré aujourd’hui l’Association Nationale des Agents Immobiliers.

« ‘Je ne pense pas que les prix des maisons ait déjà atteint leur point bas’, a déclaré Scott Anderson, un économiste de premier plan de la Wells Fargo & Co., à Minneapolis. ‘Il y a aussi un sacré paquet de maisons qui attend d’être mis sur le marché. Les gens ont l’air d’attendre le point bas mais il y a un sacré embouteillage sur l’offre’. … Les prix des maisons chutent, même si les taux d’intérêt restent à leur plus bas absolus. Le taux d’intérêt moyen aux Etats-Unis pour un prêt à taux fixe sur 30 ans était de 5,22% la semaine dernière, alors qu’il était de 5,25% la semaine précédente. » (Bloomberg)

La chute des prix des maisons s’accélère, elle ne ralentit pas. L’effondrement historique de l’immobilier se poursuit et efface des trillions de dollars des actifs des propriétaires, ce qui rend de plus en plus difficile pour les consommateurs d’emprunter sur la valeur de leur nantissement qui s’effrite. C’est pourquoi les saisies, les défauts de remboursement et les faillites personnelles atteignent des niveaux record. Selon l’Institut Américain sur les Faillites : les dossiers de faillite des consommateurs ont atteint 126.434 en juillet, en augmentation de 34,3% sur un an et de 8,7% depuis juin (116.365). Le chiffre de juillet est le total mensuel le plus haut enregistré depuis la réforme d’octobre 2005 sur la faillite (Bankruptcy Abuse Prevention and Consumer Protection Act).

C’est pourquoi les ménages et les consommateurs ne peuvent plus dépenser autant qu’ils le faisaient avant la crise. Les lignes de crédit sont rognées, l’épargne personnelle augmente et le PIB (hors plan de stimulation fiscale) se contracte.

Chacune des 3,5 millions de saisies représente des centaines de milliers de dollars que les banques ne récupèreront jamais. C’est pourquoi le taux de faillites bancaires sera beaucoup plus important que les estimations actuelles. Les banques sont confrontées à une triple poisse : des saisies qui montent en flèche, des actifs dont la valeur chute et un effondrement de l’immobilier commercial. Le petit groupe à la tête des affaires a créé un trou financier gigantesque qui force les banques à ralentir les prêts, même aux souscripteurs dont le crédit est irréprochable. La FED a accumulé des réserves bancaires en excès de 800 milliards de dollars, mais cela n’a eu aucun incidence. Les banques ne peuvent toujours pas prêter d’argent.

La hausse des prix des maisons enregistrée le mois dernier reflète les changements saisonniers et un déplacement du mal des biens les moins chers vers des maisons aux tarifs plus élevés, rien de plus. Les maisons estimées à plus d’un million de dollars restent à présent sur le marché pendant 20 mois ; une éternité en langage immobilier. Les quartiers les plus chers se sont transformés en colonies de lépreux. Intérêts zéro = mouvement zéro. Attendez-vous à un krach [immobilier] cette année !

A présent, jetez un coup d’œil à ceci ! Cela vient de Diana Olick de CNBC :

« Le nombre de maisons officiellement sur le marché, bien qu’il soit à un niveau historiquement élevé, pourrait n’être que la partie visible de l’iceberg », a déclaré Stan Humphries, chef économiste du site immobilier Zillow.com, à Seattle (Etat de Washington).

« Selon la dernière enquête de confiance des consommateurs menée par Zillow, 12% des propriétaires ont déclaré qu’ils mettront ‘très probablement’ leur maison sur le marché dans les 12 prochains mois s’ils voient des signes de retournement du marché immobilier ; 8% ont déclaré ‘probablement’ ; et 12% ‘assez probablement’. Le résultat de cette enquête pourrait se traduire par 20 millions de propriétaires essayant de vendre leurs maisons – un chiffre saisissant, étant donné que le bureau du Recensement indique qu’il y a 93 millions de maisons, d’appartements et de copropriétés aux Etats-Unis, a déclaré Humphries.

« Selon l’Association Nationale des Agents Immobiliers, le marché est actuellement sur la voie de 4.980.000 ventes de maisons par an.

« ‘A ce rythme, cela prendra environ quatre ans pour écouler ce stock en souffrance’, a-t-il déclaré.

« ‘Les stocks immobiliers en attente ont le potentiel de nous faire un nouveau croc-en-jambe sur les prix des maisons au cours du deuxième semestre’, a déclaré Steven Wood, chef économiste à Insight Economics, à Danville (Californie). (Diana Olick, "Shadow inventory lurks over US housing recovery" CNBC) Les banques utilisent toutes sortes de combines comptables pour cacher les pertes réelles ou la véritable valeur de leurs actifs dévalorisés. La seule différence entre un escroc ordinaire et un banquier commercial est un comptable bien payé.

Le système bancaire est détraqué et cela ne fera qu’empirer au fur et à mesure que les saisies dans l’immobilier commercial se multiplieront. La FED et le Trésor travaillent déjà sur les détails d’un nouveau plan de sauvetage furtif qu’ils mettront en œuvre sans l’aval du Congrès. Tout cela est très confidentiel. Ce plan impliquera plus de méga effet de levier sur les dettes du gouvernement. Bernanke s’est auto-proclamé tsar de fait de la « Nation des Fonds Spéculatifs », à Nullos-ville, USA. Un article paru dans le Financial Times de la semaine dernière illustre un peu plus comment la FED a transformé l’économie en casino sur navire à aubes :

« La Banque de Réserve Fédérale de New York embauche des traders de manière agressive, alors qu’elle cherche à gérer ses avoirs croissants en titres, faisant de la Banque Centrale l’un des recruteurs de talents financiers les plus actifs de Wall Street.

« La FED, qui déclare que la plupart de ses nouvelles recrues viennent d’entreprises financières du secteur privé, embauche des employés alors que beaucoup d’autres banques, d’agences de notation, de fonds spéculatifs et de sociétés d’investissements suppriment des emplois. Des fonctionnaires de la ville de New York ont récemment estimé que les déboires du secteur financier conduiraient à une destruction d’emplois pouvant atteindre 140.000 postes.

« Le besoin de la FED de plus de traders est une conséquence directe des efforts de la Banque Centrale pour maintenir le flux du crédit dans l’économie étasunienne. La FED a acheté des titres à revenu fixe à un tel rythme que ses actifs ont plus que doublé au cours des douze derniers mois, pour atteindre 2.000 milliards de dollars, conduisant la banque centrale à conclure qu’elle a besoin de plus de personnel pour contrôler les marchés et pour gérer ses risques de crédit ». (Financial Times, "NY Fed in hiring spree as assets soar", Aline van Duyn)

On aura tout vu! La FED enrôle un troupeau de spéculateurs professionnels juste pour maintenir à flot toutes ses billes. Quelle bonne blague ! Ce n’est pas un redressement, c’est un feuilleton de mauvaise facture. Voici comment Warren Buffet a résumé la situation sur CNBC :

« J’obtiens des chiffres sur quelques 70 entreprises, sur une base quasi-quotidienne. Tout ce que j’observe à propos de l’économie est qu’il n’y a aucun rebond. Le système financier est toujours là où la crise l’a laissé en septembre et en octobre derniers, et cela a été surmonté [comprendre : la crise a été enrayée] et c’est extrêmement important. Mais, en ce qui concerne le rétablissement économique, cela prend du temps… J’ai dit que l’économie serait sens dessous tout au long de cette année et probablement bien au-delà. J’ai bien peur que ce soit vrai. »

« L’économie est sens dessus dessous ». Cela, de la bouche même du grand manitou. Les stocks ont baissé de 11% d’une année sur l’autre. Sur la même période, les biens durables ont connu une chute de 10,4%, la capacité industrielle est au plus bas, les biens manufacturés se contractent toujours, l’immobilier est en chute libre, le fret maritime et ferroviaire est en train de racler le fond, les ventes de détail sont en pleine débâcle et, selon Krugman, la légère embellie de l’emploi était une anomalie statistique. Voici le splendide résumé que Bob Herbert a livré sur les chiffres de l’emploi :

« Quelques 247.000 emplois ont été détruits en juillet, un chiffre qui, sous des circonstances ordinaires, enverrait une onde sismique à travers tout le pays. Ce fut la plus petite destruction d’emplois depuis l’été dernier. Et, pour cette raison, cela a été vu comme un signe d’espoir. Le taux de chômage mensuel officiel a baissé de 9,5% à 9,4%… Le pays a détruit 6,7 millions d’emplois depuis le début de la Grande Récession en décembre 2007, ce qui paralyse le pays…

« Selon le Centre des Etudes sur le Marché de l’Emploi de la Northeastern University de Boston, le pourcentage de jeunes Américains ayant un emploi est le plus faible depuis les 61 ans que ces données sont enregistrées. Seulement 65% des hommes âgés de 20 à 24 ans ont travaillé sur une base quotidienne au cours du premier semestre de cette année. Dans la tranche d’âge des 25-34, habituellement une tranche d’âge de premier ordre pour se marier et fonder une famille, seulement 81% des hommes avaient un emploi… Ces chiffres sont plus qu’effrayants : ils sont catastrophiques.

« Ce devrait être l’information la plus importante aux Etats-Unis. Lorsque le chômage atteint ce genre d’extrême, il ne se contente pas de causer des dégâts aux familles, il corrode des communautés entières, nourrit un sens de désespoir et conduit au désordre…

« Un tableau plus réaliste de la crise de l’emploi apparaît lorsque l’on combine le nombre de personnes officiellement comptabilisées comme étant sans emploi avec celles qui travaillent à temps partiel parce qu’elles ne peuvent trouver un emploi à plein temps et celles qui font partie de ce que l’on appelle les réserves de main d’œuvre – des personnes qui ne recherchent pas activement un emploi (par exemple, parce qu’elles sont découragées) mais qui en prendrait un s’il était disponible… Le total de ces trois catégories s’élève au nombre stupéfiant de 30 millions d’Américains – 19% de la main d’œuvre totale.

« Ceci est de loin le plus gros problème de la nation et devrait être sa priorité numéro un. » ("A Scary Reality" Bob Herbert, New York Times)

Désolé, Bob, les médias n’ont pas de temps à perdre pour donner des infos sur l’emploi. Cela a tendance à saper les bonnes vibrations créées par les histoires de « signes de redressement ». Le rallye boursier a fait en sorte qu’il soit plus difficile de voir la vérité. Mais les faits n’ont pas changé. La déflation s’installe dans tous les secteurs et l’économie s’est réajustée à un niveau plus faible d’activité économique. Les prix dans l’immobilier d’habitation chutent, la dépense des consommateurs ralentit, les licenciements augmentent et la demande s’affaiblit. Cela signifie que la croissance sera en dessous de la moyenne dans un futur prévisible. Voici un extrait d’un discours prononcé par Janet Yellen de la Banque de Réserve Fédérale de San Francisco, tirant la même conclusion :

« Je n’aime pas rabattre le caquet à l’expansion de notre économie, mais quelques points de prudence devraient être pris en considération… un changement massif du comportement des consommateurs est en cours… Les ménages américains sont entrés dans cette récession, en étant exploités au maximum par rapport à leurs possibilités de contracter des crédits hypothécaires et autres dettes. Le taux d’épargne individuel, qui était, il y a vingt ans, aux alentours de 8%, a chuté pratiquement jusqu’à zéro. Les ménages ont financé leurs styles de vie en tirant des bénéfices sur la croissance de la bourse et de la valeur de leurs biens immobiliers, de même qu’en acceptant des niveaux d’endettement de plus en plus élevés. Mais la chute de la valeur des biens immobiliers et des actions a effacé des trillions de dollars de richesse, réduisant ainsi ces sources d’argent facile. Qui plus est, les réalités crues de cette récession ont effrayé tout net un grand nombre de ménages, les convaincant qu’ils avaient besoin d’épargner une plus grande portion de leurs revenus… Redécouvrir la frugalité signifie moins de ventes dans les centres commerciaux, moins d’emplois sur les chaînes de montage et aux comptoirs des magasins…

« Au contraire, cette économie très faible met la pression à la baisse sur les salaires et les prix. Nous avons déjà vu un ralentissement visible de la croissance des salaires et ce sont les réductions de salaire que l’on observe de plus en plus – signe des sacrifices que certains travailleurs acceptent pour maintenir leurs employeurs à flot et préserver leurs emplois. Les entreprises réduisent également les prix et leurs marges bénéficiaires pour accroître leurs ventes… Avec un chômage déjà important et qui augmentera probablement, la pression à la baisse sur les salaires et les prix devrait se poursuivre et s’intensifier… « Si l’économie n’arrive pas à se redresser rapidement, il est concevable que cette inflation très basse se transformera en déflation. Pire encore, si la déflation devait s’intensifier, nous pourrions nous retrouver dans une spirale dévastatrice dans laquelle les prix chuteraient à un rythme encore plus rapide, et l’économie sombrerait de plus en plus. »

« Des prix en baisse. » « La déflation. » « Une spirale dévastatrice. » Ce n’est pas le genre d’honnêteté que l’on attend d’un chef de la FED. Yellen doit avoir cessé de boire de la limonade !

Et n’oubliez pas que le système bancaire est toujours détraqué. Pas un cent des 700 milliards de dollars du plan de sauvetage TARP [Troubled Asset Relief Program] n’a été utilisé pour acheter des actifs toxiques. Les banques sont toujours inondées d’encre rouge. Bernanke sait depuis septembre dernier, lorsque Lehman Bros. a fait faillite, que les actifs douteux auraient dû être supprimés avant que l’économie puisse se redresser. Un système bancaire sous l’eau est une hémorragie constante pour les ressources publiques et un frein à la croissance. Bernanke le sait, mais au lieu de supprimer ces actifs en nationalisant les banques ou en restructurant leur dette (comme il aurait dû le faire), il a accru le bilan de la FED de 1.200 milliards de dollars, en apportant des liquidités que les institutions financières ont injectées dans la bourse. Le « rallye de Bernanke » a généré le capital dont les banques avaient besoin pour les prémunir contre l’amortissement de leurs dettes ou le dépôt de bilan, mais, juste en dessous de la surface, les problèmes persistent toujours. Rien que cette semaine, le Groupe Parlementaire d’Experts au Contrôle a publié un rapport accablant qui souligne le besoin de s’occuper de la question des actifs toxiques. Selon ce rapport : « La stabilité financière restera en danger si le problème sous-jacent des actifs toxiques n’est pas réglé… Si l’économie s’aggrave, en particulier si le chômage reste élevé ou si le marché de l’immobilier commercial s’effondre, alors les défauts de paiement augmenteront et les actifs à problème continueront de perdre de la valeur. Les banques connaîtront des pertes supplémentaires sur leurs actifs problèmatiques. Le système financier restera vulnérable aux conditions de la crise que le TARP devait résoudre…

« Le changement des normes comptables a temporairement aidé les banques en leur offrant une plus grande liberté de manœuvre dans la description de leurs actifs, mais cela n’a pas changé le problème sous-jacent. Pour promouvoir un rétablissement complet de l’économie, il doit y avoir plus de transparence, de responsabilité et de clarté sur l’étendue du problème des actifs en difficulté, à la fois de la part du gouvernement et des banques.

« Le problème des actifs en difficulté est particulièrement sérieux pour les bilans des petites banques. Les actifs problématiques des petites banques sont généralement des prêts entiers, mais le principal programme du Trésor pour supprimer les actifs problématiques des bilans des banques, le PPIP [Public-Private Investment Programme] ne s’adresse pour l’instant qu’aux titres hypothécaires problématiques et non pas aux prêts entiers.

« Etant donné l’incertitude en cours, la vigilance est essentielle. Si les conditions excèdent celles du pire scénario des derniers tests de résistance, alors des tests de résistance sur les plus grandes banques de la nation devraient être réitérés afin d’évaluer ce qui se passerait si les actifs problématiques subissaient des pertes additionnelles. »

En résumé : Il n’y aura pas de véritable rétablissement tant que le problème des actifs toxiques ne sera pas résolu. Malheureusement, le Trésor et la Fed ont montré qu’ils entendent occulter cette question aussi longtemps que possible.

Les actifs toxiques, les prix des maisons en chute libre et le malaise généralisé sur les marchés du crédit ne sont qu’une partie du problème. La question plus profonde est la condition lugubre du consommateur américain qui a vu son investissement immobilier se dissiper, ses fonds de pension être divisés par deux, son accès au crédit réduit et son travail mis en danger. La classe des travailleurs américains ordinaires est à présent confrontée à ce que David Rosenberg appelle « l’ère de la frugalité du consommateur – un nouveau paradigme basé sur l’épargne, la liquidation des actifs et le remboursement de la dette. » Les styles de vie devront être atténués et une nouvelle ère d’esprit économe s’ensuivra. Jusqu’alors, il semble que nous avons juste continué de jouer la comédie.

Traduit de l'anglais (US) [JFG-QuestionsCritiques]

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