La loi promise sur les conflits d’intérêt passe aux oubliettes de la République
Souvenez-vous : en juillet 2010, le Président de la République, englué dans les remous de l’affaire Woerth-Bettencourt, annonce à la télévision qu’il faut désormais encadrer les conflits d’intérêts par la loi, comprenant un peu tard qu’être à la fois trésorier du premier parti de France et Ministre du Budget est une situation pouvant paraître troublante aux yeux de nombreux français.
Il nomme donc une commission chargée de faire des propositions, présidée par le Vice-président du Conseil d’Etat, Jean-Marc Sauvé. Anticor y a été auditionnée le 8 décembre 2010 (voir notre compte-rendu).
Cette commission rend un rapport des plus honorables en janvier 2011, même si nous aurions souhaité que certaines propositions aillent plus loin dans la prévention des conflits d’intérêts. Une loi est donc annoncée et elle est présentée en Conseil des Ministres fin juillet dernier. Ce projet de loi était plutôt timoré à nos yeux (voir notre article), en retrait par rapport aux propositions de la Commission Sauvé, mais il avait le mérite d’être un premier pas constructif dans la lutte contre les conflits d’intérêt en France. Et le gouvernement le remettait dans la foulée à l’Assemblée nationale pour un vote à l’automne.
A l’époque, nous redoutions que des amendements de parlementaires, peu friands de transparence pour eux-mêmes et partisans d’un statu quo protecteur, édulcorent encore ce texte. Mais le gouvernement leur aura évité cette peine, puisque le Point annonçait hier un discret enterrement de ce projet de loi, qui ne sera donc pas voté avant la fin de la mandature, donc très probablement jamais…
Hasard du calendrier, c’était hier que la Cour de cassation a permis d’étendre désormais sans réserve l’enquête sur les volets trafic d’influence et éventuel financement occulte de parti politique de l’affaire Woerth-Bettencourt. La parenthèse de ce projet de loi de façade sur les conflits d’intérêt se referme donc en même temps que revient sur le devant de la scène judiciaire l’affaire qui l’avait justifié…