La zone euro est menacée selon Roubini

Publié le par sceptix

L'Expansion.com -  28/01/2010 10:53:00 
Shannon Stapleton / Reuters
Nouriel Roubini, professeur d'économie à l'Université de New York
 

Le célèbre économiste américain, alias "Dr Catastrophe", s'est montré très pessimiste sur le devenir de la zone euro, notamment à cause de la fragilité économique de la Grèce et de l'Espagne.

L'économiste Nouriel Roubini, connu pour avoir prévu la crise financière de 2008, s'est montré très pessimiste sur le devenir de la zone euro.  M. Roubini a également pris le contre-pied de Jean-Claude Trichet, le président de la BCE, en affirmant que la zone euro était menacée. Interrogé au Forum économique mondial de Davos, il a évoqué la possibilité d'une "bifurcation, entre un centre solide et une périphérie plus faible", qui se solderait par le départ de certains pays de l'union.

La monnaie unique européenne souffre en effet des inquiétudes persistantes sur la santé économique de la Grèce alors que les autorités du pays ont démenti mercredi avoir demandé à la Chine de leur acheter des obligations d'Etat pour faire face à ses graves difficultés financières.

Mais le plus gros danger pour la zone monétaire européenne viendrait surtout son lui d ?Espagne. La quatrième économie européenne connaît en effet un très fort taux de chômage et son secteur bancaire serait fragile. Le rendement de l'obligation espagnole à 10 ans s'est ainsi tendu à 4,094% contre 4,025% mardi.  "Si la Grèce fait faillite, c'est un problème pour la zone euro, mais si l'Espagne fait faillite, c'est un désastre" a-t-il averti.

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5 décembre 2009 (Nouvelle Solidarité) – Le rapport spécial N° 350 de la Banque Natixis du 4 décembre aborde une des questions les plus existentielles à laquelle se trouve confrontée la zone euro : qui payera pour la faillite de ce que les banquiers anglo-saxons appellent avec dédain les « PIGS » (Portugal, Irlande, Grèce et Espagne) ?

Pour Natixis, pas de doute. Pour les pays riches de la zone euro (France et Allemagne), le prix à payer pour sauver les pays en difficulté sera nettement inférieure à celui à payer en cas d’une explosion de la zone euro qui résulterait de la faillite des PIGS ! En réalité, c’est une fois de plus la même oligarchie financière qui a poussé ces pays dans des opérations à haut risque, qui demande aux contribuables de sauver, non pas les PIGS, mais les cochons qui se sont engraissés sur leur dos !

Le rapport fait d’abord un état des lieux. Selon les chiffres de Natixis, les dettes extérieures de l’Espagne, du Portugal, de la Grèce et de l’Irlande s’élèvent respectivement à 1089, 166, 543 et 182 milliards d’euros. Par rapport à leurs PIB, cela dépasse souvent les 100%.

En pratique, le service de la dette des PIGS représente 172 milliards d’euros par an pour l’Espagne (10,2% du PIB), 16 milliards pour le Portugal (8,8%), 92 milliards pour la Grèce (10,9%) et 167 milliards d’euros pour l’Irlande (9,5%). Par diverse calculs, les économistes de Natixis concluent qu’il faut au moins 331 milliards d’euros annuellement pendant 15 ans pour éviter des défauts de paiement.

Si jusqu’ici, tout débat sur l’abandon de l’euro était de l’ordre du tabou, Natixis, engagé dans une opération de guerre psychologique, proclame que le prix à payer par les pays membres de l’UE pour éviter les faillites des PIGS restera nettement inférieur au prix d’une explosion [incontrôlée] de la zone euro : « Parallèlement, un éclatement de la zone euro serait synonyme de très forte appréciation des devises françaises et allemandes vis-à-vis des devises des PIGS, très probablement aussi de l’ensemble des autres pays de la zone euro et peut-être même entre eux ! Or, la France exporte 13,5% de son PIB vers les autres membres de la zone euro, l’Allemagne 19,8% de son PIB. Ces deux pays exportent donc 740 milliards d’euros annuels vers les autres membres de la zone euro ».

« Laisser les PIGS faire défaut n’aurait donc un intérêt économique pour la France et l’Allemagne que si l’appréciation de leur devise vis-à-vis des autres membres actuels de l’union monétaire reste inférieure à 45%. Or rien n’est moins sûr. Rappelons que l’Espagne est surévaluée de 47%, l’Italie de 93% par rapport au couple franco-allemand ».

Le but de la manœuvre est de forcer la France et l’Allemagne de « faire ce qu’il faut », car l’UE est incapable de faire face à la faillite éventuelle d’un Etat.

Il n’existe formellement aucun « instrument financier pour traiter une crise de financement de l’un des membres » de l’Union monétaire, constate Jean Pisani-Ferry, le directeur du think-tank bruxellois Bruegel. Le traité de Maastricht est en réalité contradictoire à cet égard. D’un côté, il interdit toute procédure de renflouement des dettes d’un Etat (article 104B), de l’autre, il prévoit « en raison d’évènements exceptionnels (…) d’accorder, sous certaines conditions, une assistance financière communautaire » (article 103 A).

Contrairement à Dubaï, la Grèce « cotise » elle-même au FMI. Pourtant tout le monde, y compris Jean-Claude Trichet reconnaît qu’il est de facto exclu qu’un des pays de la zone euro fasse appel à l’assistance monétaire du FMI, aveu d’une faiblesse terrifiante.

D’ailleurs, le gouverneur de la Banque centrale grecque, George Provopoulos, s’est empressé à déclarer qu’il ne demandera pas l’aide du FMI, façon habile de rappeler au monde qu’il en avait le droit. En attendant, dit-il, « si la dégradation de la dette grecque continue, nous allons nous retrouver dans une position terrifiante de ne pouvoir obtenir de liquidités, car la BCE n’acceptera plus nos titres en collatéral ».

Rappelons que la BCE, face à la crainte d’une hyperinflation, vient d’officialiser sa décision d’abandonner graduellement les « politiques monétaires non conventionnelles ».

L’équation intenable résultant de la rencontre entre la nouvelle politique de la BCE et des faillites d’Etat au sein de la zone euro, accélérera la fin du système actuel.

Libérés du corset de l’euro, les pays membres retrouveront la liberté de s’associer avec les grandes puissances émergentes pour bâtir un nouveau système de crédit fondé, non pas sur l’argent, mais sur la création de richesses.


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