Le Yémen dans nos medias

Publié le par sceptix

Avant de lire ce que nous raconte la propagande officielle diffusée par les journaleux de service, regardez cette vidéo (Mécanopolis)

Les bombardements US au Yémen et le prétexte "Al-Qaeda"
envoyé par Mecanopolis. - L'info internationale vidéo.

Comme nous l’expliquions hier soir dans un article et cette nuit sur notre forum, la revendication d’Al-Qaeda  de l’attentat manqué du vol Amsterdam-Detroit de vendredi dernier n’est pas un instant crédible. Tout indique que son véritable objectif consiste à légitimer une plus large implication des États-Unis dans un conflit qui, depuis cinq ans, oppose des tribus chi’ites du Nord du Yémen, qui n’ont aucun lien avec al-Qaeda, au gouvernement de Saana, soutenu par l’Arabie Saoudite et la CIA. Malgré cette diversion crypto-terroriste, il n’est pas difficile de comprendre que c’est une fois de plus l’Iran qui est dans le collimateur des Etats-Unis et de leurs alliés.

extrait

Extrait du document pdf du communiqué d’Al-Qaeda diffusé hier (source : Forum Mecanopolis)

La dernière phase paroxystique de la guerre qui dure depuis 5 années, au Yémen, contre les rebelles Houthis, a fait plus de 2000 morts en moins d’un mois et plus de 150 000 sans-abri. Les troupes du gouvernement yéménite se battent contre environ 15 000 rebelles Houthis, armés et entraînés par l’Iran et retranchés dans les montagnes du Nord, autour de Saada, sur la frontière de l’Arabie Saoudite. Les bombardiers de l’armée de l’air saoudienne tapissent les zones rebelles et civiles, et l’armée de l’air et la marine égyptienne transportent des munitions pour l’armée du Yémen avec les encouragements et le financement des Etats-Unis.

Ce pays pauvre de la Mer Rouge, mais stratégique par sa position, scène critique, depuis des années, de la guerre contre de soi-disant extrémistes islamistes, est désormais devenu un théâtre-clé où les Etats-Unis et l’Iran luttent pour la prédominance régionale. Eu égard à cela, le conflit au Yémen peut être comparé en importance avec la guerre du Liban de 2006 et le conflit de Gaza. Ses résultats pèseront lourdement sur les positions stratégiques respectives dans les régions du Golfe Persique et de la Mer Rouge, pour les Etats-Unis, aussi bien que pour l’Arabie Saoudite, l’Egypte et, indirectement Israël aussi, vis-à-vis de l’Iran.


Plusieurs sources confirment huit traits saillants du conflit en cours au Yémen :

1. Au début septembre, l’armée du Président Ali Abdallah Saleh a lancé le 6è round de sa guerre depuis l’an 2000 contre les Houthis, en déployant environ 20 000 hommes dans une offensive majeure afin de déloger les 15 000 Houthis de leurs nids d’aigles dans les montagnes (entre 3 à 6000 m d’altitude) dans la province de Saada au nord.

2. Les Houthis sont des Zaydis qui revendiquent leur adhésion à la forme la plus pure de l’Islam chi’ite. Ils se battent pour apporter « la vraie voie » au Yémen, et restaurer l’autorité de l’Imam Zaydi renversé en 1962. Leur nom découle de celui du fondateur du mouvement, Badreddin al-Houti, qui fut tué par l’armée yéménite en 2004. Les Chi’ites Houthis et le Chi’isme iranien n’ont rien d’autre en commun, sauf  l’aide logistique de Téhéran apportée aux rebelles yéménites.

3. Les quantités de matériel lourd que les Iraniens sont parvenus à transférer aux Houthis en quelques semaines ont stupéfié Washington, Saana, Riyad et Le Caire. L’armée yéménite semble mise en difficulté de réprimer ces rebelles et même d’empêcher les combats de s’étendre au-delà de la région de Saada, vers d’autres parties du pays, y compris la capitale.

4. Craignant que le conflit et l’influence Zaydi puisse déborder par-delà la frontière du nord- Yémen vers les régions sud, saoudiennes de Najran et Asir, l’Arabie Saoudite a envoyé son armée de l’air aider l’armée yéménite en tapissant de bombes les bastions houthis dans les villages de montagne de Saada.

5. La petite armée yéménite de 66 000 hommes, manquant de stocks de matériel militaire organisés, a bientôt commencé à se trouver à court de munitions et d’équipement militaire. L’armée égyptienne s’est empressée de fournir cet approvisionnement nécessaire, en mettant en œuvre un corridor naval et aérien.

6. L’Administration Obama s’est lancée dans la mêlée, grâce à son assistance financière alimentant les efforts saoudiens et égyptiens pour venir en aide au Yémen. Elle a été tout dernièrement accordée lors de la rencontre entre les Présidents américain et égyptien à la Maison blanche, le mardi 18 août 2009. Selon cette modalité, le Président américain Barack Obama prend position contre l’Iran aux côtés d’Hosni Moubarak et du Roi Abdallah.

7. Autant que les Etats-Unis et Israël avaient été pris par surprise par les capacités militaires du Hezbollah, lors de la guerre du Liban en 2006, les Américains et ses alliés ont été stupéfaits par la maîtrise du champ de bataille des rebelles Houthi. La 1ère Division d’infanterie mécanisée de l’armée yéménite, renforcée par chacune de ses 6 brigades de commandos- parachutistes et le soutien aérien saoudien, s’est avérée incapable, depuis septembre, de briser la résistance des bastions de montagne des rebelles.

8. Sans la réalisation d’un accord global, le conflit menace de s’étendre et de conduire à une escalade vers la plus importante et la plus dangereuse guerre ayant éclaté dans n’importe quelle partie du monde arabe depuis longtemps. Les Etats-Unis ont manifestement choisi la surenchère en manipulant la revendication par al-Qaïda de cet attentat manqué du vol Amsterdam-Detroit du 25 septembre dernier.

Sur la guerre au Yémen, lire également notre article du 10 novembre dernier.

source Mécanopolis


Et maintenant place à la propaganda


Yémen: ambassades fermées par crainte d'attentats (Nouvel Observateur) (le dimanche 03 janvier 2010 à 17h)
Après les Etats-Unis, c'est au tour de la Grande-Bretagne de fermer les portes de son ambassade au Yémen par crainte de tentatives d'attentats. L'Espagne a quant à elle décidé de restreindre l'accès public à son ambassade.

 

Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ferment leurs ambassades au Yémen (AP via Yahoo! Actualités) (le dimanche 03 janvier 2010 à 13h)
Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont fermé leurs ambassades dimanche à Sanaa, au Yémen, pour des raisons de sécurité. Washington a fait état de menaces de la branche yéménite d'Al-Qaïda. Quelques heures après la décision américaine, le gouvernement britannique a annoncé à Londres avoir pris une mesure similaire. Les Etats-Unis accusent Al-Qaïda dans la péninsule arabique d'avoir entraîné et ...

 

Les Etats-Unis, craignant pour la sécurité de leurs personnels, ferment leur ambassade au Yémen (Le Monde) (le dimanche 03 janvier 2010 à 11h)
L'ambassade des Etats-Unis au Yémen a fermé dimanche, en raison de menaces d'attentats d'Al-Qaida contre les intérêts américains.

 

Londres, Washington financent une force antiterroriste au Yémen (Reuters via Yahoo! Actualités) (le dimanche 03 janvier 2010 à 10h)
Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne vont financer une unité de police antiterroriste au Yémen, annonce le gouvernement britannique.

 

Le Yémen renforce ses troupes dans des bastions d'Al-Qaïda (AP via Yahoo! Actualités) (le dimanche 03 janvier 2010 à 07h)
Le Yémen a déployé des centaines de soldats supplémentaires dans deux provinces montagneuses de l'est de son territoire, bastions d'Al-Qaïda où pourrait s'être rendu le jeune Nigérian accusé d'avoir voulu commettre un attentat à bord du vol Amsterdam-Detroit le jour de Noël, selon des responsables de la sécurité. L'envoi de ces renforts dans une région reculée largement hors de contrôle du ...

 

SANAA (AFP) - Yémen: les ambassades américaine et britannique fermées en raison de menaces (La Croix) (le dimanche 03 janvier 2010 à 17h)
Les ambassades américaine et britannique à Sanaa ont fermé dimanche en raison de menaces d'Al-Qaïda, qui a revendiqué l'attentat manqué sur le vol Amsterdam-Detroit, au moment où Washington et Londres vont coopérer davantage dans la "lutte contre le terrorisme" au Yémen et en Somalie.

 

Face à la menace d’Al-Qaida, Washington et Londres ferment leurs ambassades au Yémen (La Croix) (le dimanche 03 janvier 2010 à 17h)
Révélée par l’attentat-suicide manqué contre un Airbus en direction des États-Unis le jour de Noël , la menace d’Al-Qaida au Yémen est désormais centrale pour les Américains.

 

SANAA (AFP) - Yémen: les ambassades américaine et britannique fermées en raison de menaces (La Croix) (le dimanche 03 janvier 2010 à 15h)
Les ambassades américaine et britannique à Sanaa ont fermé dimanche en raison de menaces d'Al-Qaïda, qui a revendiqué l'attentat manqué de Noël, au moment où Washington et Londres vont coopérer davantage dans la "lutte contre le terrorisme" au Yémen et en Somalie.

 

SANAA (AFP) - Yémen: l'ambassade américaine fermée en raison de menaces d'Al-Qaïda (La Croix) (le dimanche 03 janvier 2010 à 14h)
L'ambassade des Etats-Unis à Sanaa a fermé dimanche en raison de menaces d'Al-Qaïda dans la péninsule arabique, qui a revendiqué l'attentat manqué de Noël, au moment où Washington et Londres vont coopérer plus dans la "lutte contre le terrorisme" au Yémen et en Somalie.

 

La Grande-Bretagne veut cofinancer avec les USA la lutte anti-terroriste au Yémen (AP via Yahoo! Actualités) (le dimanche 03 janvier 2010 à 05h)
Le gouvernement britannique a annoncé dimanche qu'il allait s'associer aux Etats-Unis pour financer une unité de police anti-terroriste au Yémen, où il estime que prolifère Al-Qaïda.

 

Enfin pour ceux qui veulent en savoir un peu plus sur ce pays, je conseille la lecture de ce document en PDF, dont voici un extrait :

L’identité yéménite a également pu se construire par la négative. Dans ce cadre, la rivalité avec le voisin saoudien a sans nul doute joué un rôle. Le conflit frontalier qui oppose l’Arabie Saoudite avec la RAY et la RPDY, puis avec le Yémen unifié jusqu’en 2000 (Detalle, 2000) ainsi que l’expulsion brutale d’environ 800 000 travailleurs yéménites d’Arabie Saoudite en représailles à la position, jugée pro-iraquienne, de leur gouvernement lors de
la guerre du Golfe de 1990-1991, ou encore la politique saoudienne
s’opposant à l’intégration du Yémen dans le Conseil de coopération du Golfe ont souvent contribué à forger un sentiment d’appartenance à une même communauté de destin au-delà des dualismes et des fragmentations.

Les Yéménites se définissent fréquemment en opposition à une Arabie Saoudite, riche, urbaine et dont le gouvernement, allié des  Etats-Unis, semble prêt à toutes les compromissions alors même que celui du Yémen continue à entretenir l’illusion de son indépendance (Bonnefoy, 2007).

Survivances, résistances et réactivations

L’idée d’une nation yéménite qui suivrait un processus univoque de maturation grâce à la république et à l’unité de 1990 reste à nuancer. En effet, le paradoxe qu’elle connaît, entre fondements historiques anciens et remises en cause continues, reste encore d’actualité. La contestation de la nation yéménite apparaît être liée à plusieurs facteurs : la rébellion des « perdants de l’histoire » que sont certains groupes zaydites et les socialistes, le
maintien d’un régionalisme mais aussi l’échec du développement
économique. Ces éléments expliquent bien la difficulté de certains des citoyens à se reconnaître dans l’idée même de nation yéménite. Celle-ci étant à leurs yeux aujourd’hui accaparée par le Nord, le tribalisme, le « wahhabisme » ou encore la corruption. Dès lors la nation yéménite telle qu’elle s’incarne aujourd’hui dans l’Etat est à même de devenir une référence négative, voire même un repoussoir.
Si globalement le dépassement des clivages a permis d’échapper à la stigmatisation de la plus large partie du spectre politique et religieux, il n’a toutefois pas permis d’éviter totalement la répression ni la violence. La mise à distance des sayyid est un mouvement profond qui, amorcé en 1962, a pris
différentes formes tantôt symboliques mais parfois aussi brutales. Au milieu des années 1990, dans le Hadramaout et à Aden, la destruction par les salafis (avec l’accord tacite du pouvoir) des tombeaux de saints descendants du Prophète révérés par les soufis en est un exemple (Ho, 2006)12. Depuis juin 2004, la guerre de Sa‘da qui oppose l’armée yéménite à un groupe zaydite,
la Jeunesse croyante (al-shabâb al-mu’min), initialement emmenée par Husayn al-Hûthî, sayyid et ancien membre du parlement constitue sans doute le paroxysme de la stigmatisation et de la répression. Dans l’indifférence de la communauté internationale, cette guerre a fait plusieurs milliers de victimes,
dont de nombreux civils et, en ouvrant de nouveau les blessures mal cicatrisées de la guerre civile des années 1960, menace l’un des compromis fondateur de la république et de la construction nationale (Dorlian, 2006).

La propagande gouvernementale accuse la rébellion d’être soutenue par l’Iran et d’oeuvrer pour la restauration de l’ancien régime de l’imamat zaydite, ce que les partisans d’al-Hûthî nient, dénonçant d’une part l’alliance de leur gouvernement avec les Etats-Unis et d’autre part l’émergence au Yémen d’un islam « wahhabite » anti-chiite et fondamentaliste soutenu par l’Arabie
Saoudite. Dans le contexte post-11 septembre, cette guerre exprime par ailleurs la volonté du gouvernement yéménite de montrer à ses partenaires occidentaux son engagement dans la lutte anti-terroriste. Elle apparaît alors comme le résultat de pressions extérieures l’invitant à donner les gages de sa
participation à la « Global war on terror ». Pour ce faire, il s’attaque à des « perdants de l’histoire », déjà défaits plus de quarante années auparavant et ne partageant pas grand-chose avec al-Qâ‘ida, plutôt qu’à l’équilibre fragile de sa formule politique et à son alliance avec certains islamistes influencés
tant par le salafisme que par la doctrine des Frères musulmans ou celle des jihadistes. Elle illustre également le penchant particulier d’une partie du gouvernement qui entend stigmatiser le zaydisme et, de fait, exclure la catégorie des descendants du Prophète de la nation yéménite (Vom Bruck,2005). Cette dimension revancharde  et intransigeante de la république estalors à même de favoriser une réaction de repli qui érige de nouveau le zaydisme en tant qu’identité primordiale et exclusive.

Dans un tout autre contexte, au lendemain de l’unité, ce sont les élites socialistes de l’ex-Yémen du Sud (déjà défaites par la fin de la guerre froide) qui font face à la répression du pouvoir. Sur le plan institutionnel comme politique, l’unité a été mal préparée, laissant place à une période de transition qui favorise la concurrence entre les dirigeants des deux entités. Au
cours de l’année 1993, l’assassinat de nombreux leaders socialistes tend considérablement la situation. Cette période dissimule alors mal la nouvelle domination des élites du Nord. Lors de la guerre de 1994, différentes milices islamistes viennent prêter main forte à l’armée du Nord (al-Suwaidi (dir.),1995). En dépit de la facile victoire de cette dernière qui, le 7 juillet 1994, entre
dans Aden, l’unité reste aux yeux de beaucoup un processus ambivalent à la fois souhaitable et difficilement réalisable.
Souvent à bon droit, les populations des provinces de l’ex-Yémen du Sud s’estiment victimes de discriminations à l’embauche tant dans la fonction publique que dans l’armée, et aiment à rappeler la faiblesse des investissements de l’Etat dans leurs régions, et particulièrement à Aden. Cette ancienne capitale florissante connaît, en effet, depuis les années 1960 un long déclin. Au cours des années 1990, la re-privatisation des terres agricoles
(particulièrement dans la plaine fertile d’Abyan) après la nationalisation de la période socialiste profite largement aux élites du Nord ou à leurs alliés politiques, au détriment des paysans locaux13. Par ailleurs, l’unité est parfois
vécue par certains comme un retour en arrière, dans la mesure où elle aredonné du pouvoir à certaines élites tribales qui avaient disparues, les imposant même dans des régions où elles n’avaient jamais réellement existées. La violence des vendettas ou encore l’imposition du droit tribal sont alors perçus comme autant d’éléments accréditant la thèse d’une « tribalisation » du système politique yéménite à travers la domination du Nord et le pouvoir accru des chefs de tribus, au parlement, dans les instances
politiques locales, dans l’armée ou encore directement auprès du président.
Selon une expression populaire dans les gouvernorats du Sud, le Nord est désigné par le terme « d’al-Dahâbisha » dont les habitants sont les « Dahbâshî ». Ces surnoms moqueurs font référence à un célèbre feuilleton comique de la télé yéménite diffusé dans les années 1990 dans lequel le héros, appelé Dahbâsh, faisait preuve d’un certain manque de raffinement
 et était censé caricaturer l’attitude primaire et brutale des hommes de tribu des hauts-plateaux zaydites du nord. Ce quolibet oppose donc implicitement la finesse des habitant du Sud à la brutalité, voire la bêtise supposée, de ceux du Nord. Sur un autre plan, le fait que les principales ressources en hydrocarbures soient situées dans les provinces de l’ex-Yémen du Sud
(Shabwa et Hadramaout en particulier) accroît encore davantage lesentiment de dépossession lié à l’unité. Dans ce cadre, les anciennes élites socialistes, tel l’ancien président du Sud, ‘Alî Nâsir Muhammad, exilé en Syrie, s’appuient sur ce sentiment populaire pour chercher une nouvelle légitimité et prendre la tête de la contestation, dénonçant alors la corruption du régime de  Sanaa et son incapacité à assurer le développement économique
du pays. Au cours de l’année 2008, l’ampleur des manifestations et de la répression par l’armée nationale laisse craindre le  développement d’un nouveau mouvement plus ouvertement  sécessionniste.
La région orientale du Hadramaout a une position singulière dans le canevas complexe de la nation yéménite. Son histoire et sa culture, ainsi que les liens transnationaux que ses habitants ont établis par delà les océans et avec les autres pays de la péninsule Arabique au fil des siècles, alimentent une identité régionale forte que le système républicain ne semble jamais être
parvenu à réellement affaiblir (Freitag, Clarence-Smith (dir.), 1997).

En 1994, lors de la sécession du Sud, l’engagement de commerçants ou de religieux hadramis (souvent liés à l’Arabie Saoudite) au côté des anciennes élites socialistes illustre moins leur attachement à l’idéologie de ces derniers que certaines tentations autonomistes, voire indépendantistes, de cette région.

Elle démontre également une politique saoudienne qui a longtemps joué la carte de la division du Yémen, en s’appuyant  notamment sur les réseaux   hadramis mais aussi de Shabwa. Depuis la décennie 2000, l’investissement croissant de l’Etat central dans le développement du Hadramaout illustre la
volonté du gouvernement yéménite d’intégrer pleinement cette région, notamment en tirant profit des riches commerçants saoudo-yéménites, telle les familles Buqshân ou Bin Lâdin. C’est ainsi que le quinzième anniversaire de
l’unité fut organisé à Mukalla, principale ville hadramie et donna lieu à des travaux de grande envergure et à l’annonce de nouveaux projets économiques, notamment dans le domaine de la pêche ou du tourisme.
Cette démarche rend également compte d’un rééquilibrage dans les provinces de l’ex-Yémen du Sud en faveur du Hadramaout et aux dépens d’Aden, ville toujours rendue coupable de la sécession de 1994. L’intégrationd’élites hadramies dans l’appareil d’état vise sans doute un identique objectif. C’est ainsi que le poste de premier ministre fut, entre 2001 et 2007,
occupé par un Hadrami : ‘Abd al-Qâdir Bâ Jammâl.
Afin de dépasser les résistances liées aux survivances de sentiments infra-nationaux, l’Etat a engagé, depuis 2000, un processus de décentralisation. Toutefois, celui-ci, faute de moyens financiers et matériels accordés aux instances locales élues, ne convainc guère, ni la population, ni même les bailleurs de fonds internationaux qui ont pourtant appuyé cette initiative. Cet échec, combiné aux problèmes dans les régions de l’ex-Yémen
du Sud, amène alors certains, tel le petit parti de la Ligue des fils du Yémen (Râbita abnâ’ al-Yaman, dirigé par le Hadrami ‘Abd al-Rahman al-Jiffrî, rentré au Yémen en 2007 après quatorze années d’exil du fait de son implication dans la sécession de 1994), à proposer la création de facto d’un Etat fédéral.
Celui-ci associerait sept régions jouissant d’une large autonomie politique et économique et impliquant notamment que les revenus tirés des ressources naturelles seraient alloués prioritairement aux territoires où elles sont
exploitées (...)

Publié dans Les chiens de garde

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