Amérique Latine : la démocratie attaquée

Publié le par sceptix


La démocratie attaquée: “Les média étaient notre arme secrète en Amérique Latine”

Latin America : the attack on democracy

Par John Pilger *
The New Statesman. Published 24 April 2008.
Mondialisation.ca. Canada, Le 30 avril 2008

Au-delà du bruit et de la fureur de sa conquête de l’Irak et de sa campagne contre l’Iran, la première puissance mondiale mène une guerre discrète sur un autre continent, l’Amérique latine. En ayant recours à des intermédiaires, Washington vise à restaurer et renforcer le contrôle politique d’un groupe de privilégiés qui prétendent appartenir aux classes moyennes, à détourner la responsabilité des massacres et trafics de drogue du régime psychotique colombien et ses maffieux, et d’écraser les espoirs de la majorité pauvre d’Amérique latine qui ont été soulevés par les gouvernements réformistes du Venezuela, de l’Equateur et de la Bolivie.

En Colombie, le principal champ de bataille, la véritable nature de la lutte, une lutte de classes, est brouillée par les FARC qui se livrent aux enlèvements et trafics de drogue, fournissant ainsi des arguments à ceux qui tentent de salir l’image de tous ceux qui ont marqué l’histoire épique de la rébellion en Amérique latine par leur opposition au proto-fascisme du régime de Bush. « On ne combat pas le terrorisme par le terrorisme, » a déclaré le Président Hugo Chavez lorsque les avions de guerre US écrasèrent sous leurs bombes des milliers de civils afghans, après les attentats du 11 septembre. C’est ainsi qu’il devint l’homme à abattre. Pourtant, comme tous les sondages le confirment, il ne faisait qu’exprimer l’opinion de la grande majorité des gens qui ont compris que la « guerre contre le terrorisme » était en réalité une croisade pour la domination. Pratiquement le seul chef d’Etat à oser défier Bush, Chavez fût déclaré un ennemi, et son projet d’une social-démocratie indépendante des Etats-Unis fût considéré comme une menace pour le contrôle du continent par Washington. « Pire encore, » écrivait le spécialiste de l’Amérique latine, James Petras, « la politique nationaliste de Chavez représentait une alternative en Amérique latine au moment (2002-2003) où les insurrections massives, les révoltes populaires, les chutes de régimes marionnettes des Etats-Unis (Argentine, Equateur, Bolivie) faisaient tous les jours la une des journaux. »

Il est impossible de sous-estimer la menace que cette alternative représente aux yeux des « classes-moyennes » de ces pays où foisonnent privilèges et misères. Au Venezuela, leur « grotesque fantasme à affirmer qu’ils sont gouvernés par un dictateur communiste brutal », pour citer Petras, rappelle la paranoïa de la population blanche qui soutenait le régime de l’Apartheid en Afrique du Sud. Comme en Afrique du Sud, le racisme est omniprésent au Venezuela où les pauvres sont ignorés, méprisés ou traités avec condescendance, et où un commentateur peut se permettre de qualifier Chavez, qui est métissé, de « singe ». Ce venin est dispensé par les super-riches qui vivent derrière les murs de quartiers appelés « Country Club », mais aussi par ceux des classes moyennes qui aspirent à les rejoindre, cadres, journalistes, publicitaires, artistes, éducateurs et autres professions qui s’identifient à tout ce qui vient des Etats-Unis. Les journalistes ont joué un rôle clé - rôle reconnu par un des dirigeants et financiers du coup d’état avorté contre Chavez en 2002. « Nous n’aurions pas pu le faire sans eux, » dit-il. « Les média étaient notre arme secrète ».

Bon nombre de ces gens se considèrent comme « progressistes » et ont leurs entrées auprès des journalistes étrangers qui aiment se dire « de gauche ». Ce n’est pas une surprise. Lorsque Chavez fût élu la première fois en 1998, le Venezuela n’était pas une dictature archétype de l’Amérique latine, mais une démocratie libérale avec certaines libertés, dirigée par et pour ses élites qui pillaient les revenus pétroliers en laissant quelques miettes aux millions d’invisibles des barrios. Un pacte entre les deux partis principaux, appelé « puntofijismo », ressemblait à la convergence entre le New Labour et les Conservateurs en Grande Bretagne, ou les Républicains et les Démocrates aux Etats-Unis. A leurs yeux, l’idée de souveraineté populaire représentait un anathème, et le représente encore.

Prenez le cas de l’éducation supérieure. A l’Université Centrale Vénézuélienne, un établissement « public » financé par l’argent des contribuables et réservé à l’élite, plus de 90 pour cent des étudiants sont issus des classes supérieures et « moyennes ». Ce milieu élitiste, avec d’autres, a été infiltré par des groupes liés à la CIA et, lorsqu’ils ont défendu leurs privilèges, ont été soutenus par des « progressistes » à l’étranger.

Dans la guerre contre la démocratie en Amérique latine, la ligne de front est la Colombie et la cible principale est Chavez. Il est facile de comprendre pourquoi. Une des premières mesures de Chavez a été de relancer l’organisation des producteurs de pétrole, l’OPEP, et forcer le prix du pétrole à des niveaux historiques. Dans le même temps, il a réduit le prix du pétrole pour les pays les plus pauvres de la région des Caraïbes et d’Amérique centrale. Il a utilisé la nouvelle richesse du Venezuela pour rembourser la dette, notamment celle de l’Argentine, et de facto a expulsé le Fonds Monétaire International d’un continent sur lequel, jadis, ce dernier régnait. Il a réduit de moitié la pauvreté tandis que le PNB grimpait. Et surtout, il a donné aux pauvres l’espoir de voir leurs vies s’améliorer.(la suite  ici

http://socio13.wordpress.com/2008/05/08/la-democratie-attaquee-les-media-etaient-notre-arme-secrete-en-amerique-latine/

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