La globalisation de la surveillance : aux origines de l’ordre
Armand MATTELART et Gilles SAINATI :
La globalisation de la surveillance : aux origines de l’ordre
sécuritaire
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La globalisation de la surveillance : aux origines de l'ordre
sécuritaire
Mattelart, Armand
Editions La Découverte
18.00 euros
La décadence sécuritaire
Sainati, Gilles
Schalchli, Ulrich
Editions la Fabrique
14.00 euros
A l’occasion de la parution de leurs deux derniers essais, le
sociologue Armand Mattelart et le magistrat Gilles Sainati débattent
de la “globalisation de la surveillance et de la question sécuritaire”
de nos sociétés, avec Jean-Jacques Gandini, avocat à Montpellier.
La globalisation de la surveillance
(Armand Mattelart) :
Vidéosurveillance, fichage, empreintes génétiques, écoutes, puces
RFID… Dans les régimes démocratiques, les différentes techniques
d’intrusion dans la vie quotidienne des individus se multiplient, au
nom de la lutte contre les “nouvelles menaces”. La “guerre contre le
terrorisme” qui a suivi le 11 septembre 2001 n’a fait que rendre plus
oppressant ce monde qui nous rapproche de celui imaginé par Orwell
dans 1984.
Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Comment les sociétés
démocratiques ont-elles accepté que leurs droits et liberté soient peu
à peu amputés par des dispositifs de surveillance de plus en plus
sophistiqués ? Quelles sont les racines et doctrines à l’origine de
ces dispositifs ? Dans ce livre documenté et accessible, Armand
Mattelart répond à ces questions. De l’anthropométrie du XIXe siècle
au Patriot Act, en passant par l’analyse des doctrines militaires
contre-insurrectionelles et du projet Échelon, il construit une
généalogie de ce nouveau pouvoir de contrôle et étudie sa dynamique de
mondialisation. Il montre qu’au nom de la défense de la liberté et des
impératifs de sécurité nationale, les États ont imposé et construit
une définition de l’ennemi de plus en plus floue, tellement floue
qu’elle a permis et permet encore tous les abus.
Ce livre invite à une prise de conscience citoyenne, indispensable à
l’heure où le seuil de tolérance des sociétés démocratiques à l’égard
de la surveillance ne cesse de baisser.
Armand Mattelart est professeur émérite de sciences de l’information
et de la communication à l’Université Paris-VIII. Il a publié, aux
éditions La Découverte, Histoire de la société de l’information,
Histoire des théories de la communication (avec Michèle Mattelart),
Introduction aux Cultural Studies (avec Erik Neveu), L’invention de la
communication, Histoire de l’utopie planétaire.
La décadence sécuritaire
(Gilles Sainati et Ulrich Schalchli) :
On a beaucoup écrit sur le “sécuritaire”. Tout en se plaignant de
cette évolution de la politique d’État, certains pensent cette phase
nécessaire. D’autres égrènent le catalogue des mesures répressives et
sont surpris des atteintes renouvelées aux libertés, de la dimunition
de la sphère privée et croient encore qu’en votant pour tel ou tel
candidat, leur sort en sera amélioré. Tous ces questionnements
existent et sont répertoriés, ils font débats.
Mais l’analyse proposée dans ce livre se veut un peu plus radicale et
démontre la chute rapide (dix ans) et programmée de pans entiers de
l’État de droit.
L’angle d’observation est celui de la disparition des notions mêmes de
justice, de juste et de droit, en faveur d’un arbitraire
bureaucratique qui sert une fraction de plus en plus étroite de la
population. “Tolérance zéro”, pénalisation des comportements sous le
vocable d’“incivilités”, tatouage des populations à travers les
fichiers informatiques, marquage génétique, inféodation de l’appareil
judiciaire à un exécutif musclé...
La diffusion de méthodes et de concepts parfaitement étrangers au
raisonnement juridique vient pervertir l’institution judiciaire pour
l’enrégimenter dans une vaste entreprise de maintien de l’ordre public
où l’efficacité prétend faire litière des juridismes surannés. À une
justice artisanale doit succéder une organisation précise, méthodique,
efficace, dont les résultats sont comptables. Diluée dans un vaste
dispositif de concertation et d’action, la justice met finalement à la
disposition de l’administration les pouvoirs de violation des libertés.
Au nom de l’efficacité, il faut “décloisonner” les services, partager
les informations et les savoir-faire, simplifier les procédures,
fluidifier, être réactif, agir en temps réel, utiliser toutes les
ressources de l’outil informatique. Ce faisant, on oublie seulement
que l’efficacité n’est pas la justice, que le droit a justement pour
fonction d’entraver l’efficacité du pouvoir, quelle que soit la
légitimité du but poursuivi.
Derrière cette décadence sécuritaire - qui, à partir de la justice, se
diffuse dans tous les champs de l’État - emmerge un projet politique
qui passe par une limitation de plus en plus accrue des libertés
publiques et individuelles, afin de maintenir une domination de
l’élite sur le plus grand nombre.
Gilles Sainati est docteur en droit, magistrat depuis 1986, membre du
syndicat de la magistrature, secrétaire général de ce syndicat de 1999
à 2001. Il a codirigé l’ouvrage collectif La Machine à punir, L’Esprit
frappeur, 1996, et écrit de nombreux articles de réflexion sur la
justice.