Faillites bancaires et crise économique : les Etats-Unis sont-ils en voie de quart-mondisation ?

Publié le par sceptix



Le FMI souligne ses craintes au sujet des "pertes futures de certaines grandes banques commerciales". La récente faillite d'IndyMac risque d'alourdir la note, ainsi que celles datant de ce dernier week-end et qui affectent deux banques régionales, la First Heritage Bank de Newport Beach, basée en Californie, et la First National Bank of Nevada, basée dans l'état éponyme.

Permettez-nous de vous délivrer la liste -- mettons le tiercé de tête -- des prochains candidats au placement sous protection de la loi "chapitre 11" sur les faillites, ou la liquidation pure et simple. Nous plaçons sur la plus haute marche de notre podium la Colorado Federal Savings Bank puis l'Eastern Savings Bank (établie dans le Maryland) et ensuite la First Priority Bank (basée en Floride).

Pour ceux qui ne s'intéressent qu'au Quinté+, nous ajoutons, ex-aequo, la Security Pacific Bank (de Los Angeles, Californie) puis la Magnet Bank -- qui s'attire surtout... des ennuis -- de Salt Lake City (Utah). Vous observerez que l'écrasante majorité de ces établissements opère dans des zones où le secteur immobilier traverse sa pire crise depuis 1929, avec des chutes de prix qui peuvent localement dépasser les 50%.

** Comme nous l'avons déjà expliqué, passé un certain seuil de taux de vacance des logements, une rue se vide de ses habitants en quelques mois tandis que les squatters et les marginaux investissent certaines maisons et vandalisent les autres. Les biens immobiliers frappés par ce processus ne tardent plus à ne valoir que ce que vaut le terrain.

Vous n'aurez pas tout perdu si vous êtes banquier en Californie ou en Floride... mais que vaut une dizaine d'acres de désert desservis par une route poussiéreuse dans l'Utah, le Colorado ou le Nevada ? Qu'est-ce que valent des terrains battus par les vents du Nord dans une triste banlieue industrielle de l'Illinois ou de l'Ohio où les constructeurs automobiles et leurs sous-traitants ont fermé la moitié des usines en 18 mois ?

Avec un taux de chômage de 30% à proximité de ce qu'il convient d'appeler de nouvelles friches industrielles et des taux de délinquance records, les mises aux enchères ne débouchent sur rien. Les rares acheteurs -- qui doivent parier sur un rebond de l'immobilier d'ici l'an 2030 -- seront bien inspirés de ne pas aller vérifier sur place l'état de leur propriété, de peur d'être agressés ou de se voir "confisquer" leur véhicule par une des bandes ultraviolentes qui règnent sur ces quartiers nouvellement déshérités.

** Cela doit vous apparaître très éloigné de la vision traditionnelle du rêve américain ; peut-être même pensez vous que nous avons de mauvaises lectures -- d'inspiration démocrate, lorsqu'il s'agit de dénoncer la misère engendrée par l'inégalitarisme du système américain à la mode ultraconservatrice -- et que nous nous ingénions à noircir le tableau.

Mais nous disposons de récits extrêmement précis et d'une actualité brûlante, provenant  d'ingénieurs ou de dirigeants français mutés outre-Atlantique pour y gérer des filiales de grands groupes industriels hexagonaux sur la côte Est. Ils sont stupéfaits par la pauvreté et l'insécurité régnant dans la plupart des villes frappées par le chômage de masse. Les gens y vivent de petits boulots qui les excluent des statistiques officielles et ils disposent souvent de moins de 400 $ par mois pour s'en sortir.

Un quartier en déshérence, même dans les environs de Chicago ou de Philadelphie, cela ressemble parfois à la Nouvelle-Orléans après le pompage des eaux du lac Champlain : maisons incendiées et infrastructures urbaines saccagées, plus aucun commerce à des dizaines de kilomètres à la ronde, aucune compagnie de transport public ne s'y aventure, pas plus que les éboueurs ou la compagnie qui gère le réseau électrique... et l'ambiance n'est plus très loin de ressembler à celle qui précède une guerre civile.

Une relecture des Raisins de la Colère nous projette 65 ans en avant, c'est-à-dire dans l'Amérique de 2008 : étonnez-vous après cela que les banques locales, puis à son tour Wall Street, prennent peur ! Et si, comme notre compère le lièvre, l'Amérique revenait à son point départ, celui qui inspira John Steinbeck ?

Philippe Béchade,

Voir la totalité de l'article ici : http://www.la-chronique-agora.com/articles/20080729-1085.html

Vous remarquerez qu'aucun média français  n'a parlé des fallites des banques américaines

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