Belgique: à Fleurus, l'inquiétude monte après la fuite d'iode radioactif
"On nous a abandonnés": comme nombre de ses voisins, Léopold Gravy, riverain du laboratoire médical de Fleurus (sud), estime que les autorités belges n'ont pas pris les mesures préventives nécessaires après la fuite d'iode radioactive du week-end dernier.
"On veut la vérité, c'est tout", enchaîne un client attablé au comptoir de la petite taverne "Aux bons amis", située elle aussi, comme la maison de M. Gravy, à quelques centaines de mètres seulement de l'Institut des radioéléments (IRE), où s'est produit l'incident nucléaire le plus grave de l'histoire de la Belgique.
"Samedi, on nous disait que ce n'était rien, mardi c'était déjà plus grave et aujourd'hui, c'est la catastrophe", peste aussi Richard Charlier, un plombier de 54 ans qui travaille dans le quartier.
Interdiction de photographier les bâtiments de l'IRE, hauts de deux étages et surplombés par une grande cheminée. L'Institut, reconnu d'utilité publique, est installé dans une vaste zone industrielle au nord de Charleroi, la grande ville industrielle wallonne à une soixantaine de kilomètres au sud de Bruxelles.
La fuite d'iode radioactif, que l'IRE produit pour l'industrie médicale, avait été présentée dans un premier temps par les autorités comme totalement sans conséquence pour la population.
Mais depuis jeudi soir, lorsque de nouvelles analyses ont révélé des taux de contamination plus élevés que les premiers tests réalisés, les autorités belges recommandent aux habitants de Fleurus et des villages situés dans un rayon de 5 kilomètres alentour de ne plus consommer les fruits et légumes de leur potager et de s'abstenir de boire l'eau de sources ou de pluie.
"Je ne sais pas si je ne vais pas déménager", explique Philippe Hocq, un horloger de 40 ans actuellement au chômage.
Ce vendredi, des experts du Centre de recherche nucléaire de Mol, en Flandre (nord), sont passés chez lui et sa mère.
"Ils ont pris des salades, des poires. Ils vont nous contacter dans quelques jours pour nous donner les résultats. Mais qu'est-ce qu'on a déjà dans le corps? On n'en sait rien", s'interroge, non sans fatalisme, M. Hocq.
"Des poires, des haricots, on en a déjà mangés depuis le week-end dernier", explique lui aussi M. Gravy, 70 ans, directeur d'école à la retraite.
Il estime que les autorités comme l'entreprise ont trop tardé à informer les gens comme lui. D'autant qu'il n'a pas vu passer les voitures de police munies de hauts-parleurs qui ont sillonné les rues vendredi en appelant à ne pas consommer la production des potagers.
"On joue tout de même avec la vie du public", soupire-t-il, alors que les scientifiques flamands emportent de grands sacs en plastique remplis d'herbe et de feuilles prélevées dans les jardins alentours.
"L'information est mauvaise et menteuse. C'est inquiétant", conclut Roberto Carbini, 58 ans. "Surtout que ce n'est pas la première fois", poursuit-il, alors qu'à 2 km de là, une autre installation, l'incinérateur de Pont-de-Loup, préoccupe aussi les habitants.
"Mais nous, on est des petits, on n'est pas écoutés", affirme M. Carbini.
Une enquête devra déterminer les causes de l'incident, mais pour Olivier Hoc, un restaurateur de 36 ans, la cause est entendue: "tout ça, c'est dû à la productivité", qui relègue selon lui les mesures de sécurité à l'arrière plan
http://www.france24.com/fr/20080829-belgique-a-fleurus-linquietude-monte-apres-fuite-diode-radioactif