des centaines de disparus depuis le 11 septembre au PAKISTAN
ASIE DU SUD. Une Pakistanaise en Suisse pour plaider la cause de son époux, disparu dans le cadre de la lutte antiterroriste.
Caroline Stevan
Vendredi 12 septembre 2008
Vendredi 12 septembre 2008
Elle a le regard fatigué, une valise pleine de documents et les pensées tournées vers sa famille. A l'invitation d'Amnesty International, Amina Janjua est en tournée en Europe et aux Etats-Unis pendant un mois, afin de sensibiliser l'opinion au problème des disparus pakistanais. Son mari s'est volatilisé en juillet 2005, alors qu'il se rendait à Peshawar en bus.
«Ce jour-là, nous avons pris notre petit déjeuner comme d'habitude, dans la bonne humeur. Masood était un bon époux, amoureux et attentif. Tout allait très bien entre nous. Il ne serait pas parti sur un coup de tête.» De fait, un prisonnier libéré en 2007 affirme avoir croisé Masood dans une geôle militaire de Chaklala, tout près de Rawalpindi, où vit la famille Janjua. «C'est affreux de ne pas savoir s'il est toujours là-bas, ce qu'il endure et si je le reverrai un jour. Je ne sais pas pourquoi c'est tombé sur lui. On l'accuse d'espionnage, mais c'est juste un homme d'affaires», plaide Amina Janjua.
Selon Défense des droits humains, l'association qu'elle a créée au Pakistan avec quelques autres proches de disparus, 572 personnes sont actuellement introuvables. Il y en aurait des milliers d'autres, non répertoriées. La militante dénonce un système généralisé. «Cette tragédie résulte de jeux politiques à très haut niveau. Forces de sécurité, police et autres services secrets doivent faire du chiffre et livrer des suspects. Il y a une surenchère entre les agences, qui les pousse à arrêter n'importe qui, d'autant que les Etats-Unis versent de l'argent pour cela. Ces disparitions ont commencé avec le 11 septembre et la lutte antiterroriste.» Opposants politiques et journalistes trop scrupuleux ont également été victimes de ce zèle «sécuritaire».
Travail des juges sapé
La démission du président Pervez Musharraf le mois dernier avait redonné un peu d'espoir aux familles des disparus. Fin 2006, en effet, la Cour suprême pakistanaise a commencé à examiner les cas portés à sa connaissance. En une année, ce travail a permis de localiser et de faire libérer une centaine de personnes. Au fil des révélations, les autorités pakistanaises, largement impliquées, ont commencé à saper le travail des magistrats, jusqu'à la révocation de la plupart des juges en novembre 2007. Le nouveau gouvernement a promis de les réintroduire. Asif Ali Zardari, qui a prêté serment mardi comme président, rechigne cependant, soucieux de limiter tout contre-pouvoir. «J'ai rencontré les nouveaux dirigeants, relève Amina Janjua. Ils m'ont promis qu'ils feraient quelque chose. Ils sont très bons pour les déclarations, mais je n'ai pas besoin de cela. Je veux mon mari.» Ce vendredi, cette mère de trois enfants ira plaider sa cause devant le Conseil des droits de l'homme.
http://www.letemps.ch/template/international.asp?page=4&contenuPage=&article=239506&quickbar=
«Ce jour-là, nous avons pris notre petit déjeuner comme d'habitude, dans la bonne humeur. Masood était un bon époux, amoureux et attentif. Tout allait très bien entre nous. Il ne serait pas parti sur un coup de tête.» De fait, un prisonnier libéré en 2007 affirme avoir croisé Masood dans une geôle militaire de Chaklala, tout près de Rawalpindi, où vit la famille Janjua. «C'est affreux de ne pas savoir s'il est toujours là-bas, ce qu'il endure et si je le reverrai un jour. Je ne sais pas pourquoi c'est tombé sur lui. On l'accuse d'espionnage, mais c'est juste un homme d'affaires», plaide Amina Janjua.
Selon Défense des droits humains, l'association qu'elle a créée au Pakistan avec quelques autres proches de disparus, 572 personnes sont actuellement introuvables. Il y en aurait des milliers d'autres, non répertoriées. La militante dénonce un système généralisé. «Cette tragédie résulte de jeux politiques à très haut niveau. Forces de sécurité, police et autres services secrets doivent faire du chiffre et livrer des suspects. Il y a une surenchère entre les agences, qui les pousse à arrêter n'importe qui, d'autant que les Etats-Unis versent de l'argent pour cela. Ces disparitions ont commencé avec le 11 septembre et la lutte antiterroriste.» Opposants politiques et journalistes trop scrupuleux ont également été victimes de ce zèle «sécuritaire».
Travail des juges sapé
La démission du président Pervez Musharraf le mois dernier avait redonné un peu d'espoir aux familles des disparus. Fin 2006, en effet, la Cour suprême pakistanaise a commencé à examiner les cas portés à sa connaissance. En une année, ce travail a permis de localiser et de faire libérer une centaine de personnes. Au fil des révélations, les autorités pakistanaises, largement impliquées, ont commencé à saper le travail des magistrats, jusqu'à la révocation de la plupart des juges en novembre 2007. Le nouveau gouvernement a promis de les réintroduire. Asif Ali Zardari, qui a prêté serment mardi comme président, rechigne cependant, soucieux de limiter tout contre-pouvoir. «J'ai rencontré les nouveaux dirigeants, relève Amina Janjua. Ils m'ont promis qu'ils feraient quelque chose. Ils sont très bons pour les déclarations, mais je n'ai pas besoin de cela. Je veux mon mari.» Ce vendredi, cette mère de trois enfants ira plaider sa cause devant le Conseil des droits de l'homme.
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