Les économistes divisés sur les comportements des épargnants

Publié le par sceptix

Les précédentes crises ont tour à tour conduit à des hausses ou à des baisses du taux d'épargne des ménages, qui est déjà élevé en France. Certains économistes redoutent que l'inquiétude ne l'emporte. 

La crise nourrit les discussions des Français, mais il est encore difficile de savoir comment elle va affecter leur comportement. Vont-ils accroître leur épargne, déjà élevée en France (autour de 15,8 % de leur revenu cette année) ? Vont-ils plutôt privilégier une consommation immédiate sur une épargne devenue fragile et incertaine ? La question n'est pas sans enjeu : 1 point d'épargne, c'est 12 milliards d'euros - soit 0,6 point de PIB -, rappelle André Babeau, conseiller scientifique au Bipe. Surtout, une hausse du taux d'épargne des ménages pourrait contribuer à geler davantage l'économie. Pour 2009, note Bercy, " l'appréciation est consensuelle sur le taux d'épargne, à 15,6 % dans le consensus des économistes et à 15,8 % dans le projet de loi de Finances ". Mais c'était avant la crise et cela ne retraçait qu'une moyenne entre des opinions en réalité dispersées.

 

" Le comportement spontané, aujourd'hui, c'est d'augmenter le taux d'épargne à titre de précaution parce qu'à court terme, c'est l'inquiétude qui l'emporte ", juge Michel Didier, directeur général de COE-Rexecode. La dégradation attendue et probablement durable de la conjoncture, avec, déjà, la remontée du nombre de chômeurs en août, plaide aussi en ce sens, tout comme le relèvement des prévisions de déficit public, qui pourrait faire craindre de futures hausses d'impôts.

 

Mécanisme d'effet richesse

Les moins-values potentielles liées à la chute des cours boursiers et au début de baisse des prix dans l'immobilier pourraient aussi inciter les ménages à réduire leur consommation, via le mécanisme d'effet richesse. Mais " contrairement aux Etats-Unis, il n'y a pas en France d'effet richesse ou alors il est très faible ", assure Eric Dubois, chef du département de la conjoncture à l'Insee. La découverte, par de nombreux ménages, que leur épargne n'était que partiellement garantie par les banques pourrait, à l'inverse, les inciter à puiser dans leurs actifs. De même, le ralentissement attendu du pouvoir d'achat l'an prochain pourrait entraîner une baisse du taux d'épargne, les ménages souhaitant conserver un certain niveau de consommation.

 

L'enseignement des crises passées n'est pas, en réalité, d'un grand secours. En 1987, les ménages avaient baissé de près de 2 points leur taux d'épargne pour compenser la stagnation de leur pouvoir d'achat. En 1993, en revanche, ils avaient accru leur épargne et baissé leur consommation. En 2001 et 2002, après l'éclatement de la bulle Internet, le taux d'épargne avait lui aussi remonté, mais le pouvoir d'achat était encore vigoureux...

 

" Il existe en réalité plusieurs dizaines de facteurs ayant une incidence sur le comportement des ménages en matière d'épargne ", souligne André Babeau, conseiller scientifique au Bipe. Lui pense que le besoin d'assurer un certain niveau de consommation l'emportera sur l'inquiétude et entraînera donc un repli du taux d'épargne l'an prochain.


VÉRONIQUE LE BILLON

 

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