Nicolas Sarkozy fait désormais de l'emploi sa priorité
Il gère la crise... et continue de faire de la politique. Nicolas Sarkozy a reçu vendredi 10 octobre à l'Elysée les sept ministres qu'il réunit régulièrement (Luc Chatel, Xavier Darcos, Brice Hortefeux, Nathalie Kosciusko-Morizet, Nadine Morano, Laurent Wauquiez, Eric Woerth), alors que les marchés continuaient de s'effondrer. Le président de la République a vivement critiqué le président de l'Assemblée nationale Bernard Accoyer, qui a prêté le flan à l'opposition, en proposant une amnistie fiscale pour les contribuables qui accepteraient de rapatrier leurs capitaux pour souscrire un grand emprunt national. Il s'est aussi agacé contre Valéry Giscard d'Estaing, qui a dénoncé vendredi dans un entretien à La Tribune "l'incompétence et l'agitation" qui ont, selon lui, aggravé la crise.
Sur le fond, M. Sarkozy a expliqué qu'il ne cantonnerait pas à la gestion de la crise financière, et voulait être actif sur l'économie réelle. Il maintient ses déplacements sur le terrain. L'accueil houleux des salariés, lundi 6 octobre, à l'usine Renault de Sandouville, lui a donné un avant-goût des difficultés qui s'annoncent. "L'emploi redevient la priorité", commente un ministre, alors que le chômage est redevenu, selon la Sofres, la première préoccupation des Français devant le pouvoir d'achat et la santé. Après les très mauvais chiffres du mois d'août (+ 41 300 chômeurs), M. Sarkozy compte présenter mardi un plan d'action sur l'emploi.
Il s'est montré plus évasif sur le budget, jugé caduc par les économistes, et l'envolée attendue des déficits. "Sur ce sujet, il a dit : une chose après l'autre", commente un ministre.
Sur le plan politique, le président de la République a voulu couper court aux rumeurs de remaniements, alors que le nom d'Edouard Balladur, âgé de 79 ans, a circulé pour remplacer à Bercy Christine Lagarde. Nicolas Sarkozy a renouvelé sa confiance à la ministre de l'économie, estimant que les Allemands n'avaient pas été corrects en torpillant ses propositions pour sortir de la crise financière et qu'il ne fallait pas la déstabiliser. Une réassurance pour traverser la crise. "Christine Lagarde n'est pas destinée à être éternelle", assure un participant. M. Sarkozy a aussi tordu le coup à une éventuelle entrée au gouvernement de Dominique de Villepin, renvoyé en correctionnelle dans l'affaire Clearstream.
PAS DE REMANIEMENT À CHAUD
M. Sarkozy ne veut pas de remaniement à chaud. Si le premier ministre britannique Gordon Brown a emprunté cette voie, c'est, a-t-il expliqué, parce qu'il avait une cote de popularité tombée à 18 %. L'exécutif français n'en est pas là. Le remaniement aura lieu, au plus tôt début janvier, au terme de la présidence française de l'Union européenne, au plus tard après les élections européennes de juin 2009, lorsqu'il faudra remplacer à l'agriculture Michel Barnier qui espère devenir député ou commissaire européen. Les ministères régaliens sont appelés à bouger. La garde des sceaux Rachida Dati n'est plus guère en cour. La ministre de l'intérieur Michèle Alliot-Marie ne l'a jamais été. Le ministre de l'immigration et de l'identité nationale Brice Hortefeux briguerait la Place Beauvau. Il a pour nouveau directeur de cabinet un préfet de haut calibre, Michel Bart.
M. Sarkozy prépare aussi les échéances électorales. A l'UMP, M. Hortefeux pourrait être chargé provisoirement des élections, en remplacement d'Alain Marleix, secrétaire d'Etat aux collectivités territoriales, chargé du redécoupage électoral. L'objectif est d'éviter des conflits d'intérêt trop flagrants. Le président réfléchit aussi aux têtes de liste qui conduiront la bataille des élections européennes. Ce pourrait être Rama Yade en Ile-de-France et Dominique Baudis en Aquitaine.
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