une politique monétaire irresponsable

Publié le par sceptix

Le « plan Paulson » récemment adopté par le Congrès américain prévoit de mettre 700 milliards de dollars à la disposition des autorités américaines pour sauver de la faillite un certain nombre d’établissements bancaires et financiers, soit en rachetant leurs actifs les plus risqués, soit en leur fournissant des fonds propres, c’est-à-dire en achetant une partie de leur capital.

Et on essaie maintenant de transposer ce type de dispositions en Europe. Les autorités françaises semblent donc décidées à créer un fonds habilité à aider les banques qui seraient défaillantes.

On justifie une telle création par l’idée qu’il faut éviter une « crise systémique », c’est-à-dire des faillites en cascade, la faillite d’une banque pouvant entraîner la faillite d’autres banques détentrices de créances sur la première. Or, en dépit de la quasi-unanimité qui semble exister autour d’un tel plan, il existe bien des raisons de mettre en cause sa légitimité et de penser que l’État français n’utilise pas au mieux les ressources qu’il ponctionne sur les contribuables.

On ne peut en fait évaluer la portée de ce plan sans s’interroger sur l’origine de l’actuelle crise financière. Une chose nous semble claire, même si elle est ignorée de la plupart des commentateurs : l’actuelle crise vient de la politique irresponsable menée par les autorités monétaires américaines dans les premières années du XXIe siècle.

En inondant le monde de liquidités et en incitant les banques à prêter dans n’importe quelles conditions du fait d’un taux d’intérêt extrêmement bas, elles ont créé l’illusion d’une abondance d’épargne, alors qu’elle n’existait pas. On a donc financé n’importe quoi, en particulier des investissements peu rentables, des achats immobiliers par des personnes insolvables.

Une telle illusion ne peut pas durer longtemps et c’est ce que l’on voit maintenant. Malheureusement, on ne refait pas le passé et on est bien obligé de supporter ce qu’il nous lègue, aussi dramatique soit-il.

L’État ne doit pas intervenir Certaines banques ont pris plus de risques que d’autres et ce sont elles qui ont le plus de probabilité de faire faillite. Or, si l’État vient à leur secours, d’une manière ou d’une autre, il ne fait que perpétuer les déséquilibres correspondants, il légitime a posteriori leur comportement irresponsable.

Mais qu’arrive-t-il s’il n’intervient pas ? Tout d’abord certains établissements financiers sont rachetés par d’autres et c’est effectivement ce que l’on voit actuellement dans un certain nombre de pays. Les acheteurs mettent alors en place les moyens nécessaires pour liquider les mauvais investissements du passé et pour assainir le fonctionnement des organisations défaillantes.

Le fait même que certaines banques soient capables et désireuses de racheter celles qui sont menacées prouve bien que toutes n’ont pas eu une gestion aussi contestable.

Dans ce cas de rachat, le contribuable n’est pas mis à contribution, ce qui est bien normal. Ce sont les actionnaires de la banque défaillante qui perdent une partie de leur patrimoine, leur banque étant rachetée à un prix déprécié. Mais on sait bien, lorsqu’on achète une action, que les cours peuvent s’effondrer et que l’on peut faire des pertes.

Les actionnaires ne peuvent donc s’en prendre qu’à eux-mêmes, tandis que la masse des contribuables ne devrait pas être concernée
par la gestion trop risquée de certaines banques.

Si, par contre, l’État intervient il risque tout simplement de perpétuer les déséquilibres. Cela est particulièrement vrai si des liquidités sont créées à cet effet et si l’on baisse les taux d’intérêt : on recommence alors les erreurs du passé et on risque de relancer un nouveau cycle financier et économique. Par ailleurs, en sauvant les établissements les plus mal gérés de la faillite, on enracine l’idée que l’irresponsabilité n’est pas grave, puisque l’État – c’est-à- dire en fait les contribuables – sera là pour éviter la sanction de la faillite.

Certes, on comprend que les dirigeants des banques défaillantes préfèrent l’intervention étatique au rachat par un concurrent :
dans le premier cas ils ont une chance de rester en place, ce qui est beaucoup moins probable dans le second cas. Mais les contribuables doivent-ils être taxés pour permettre le maintien au pouvoir d’équipes dirigeantes qui ont pris des risques excessifs ?

Les individus sont privés du fruit de leurs efforts En annonçant la création de la Société de prises de participation de l’État (SAPPÉ), destinée à prendre des participations dans le capital des banques en difficulté, François Fillon a prétendu que cela n’aurait pas d’incidences budgétaires.

Malheureusement, les miracles n’existent pas. Pour pouvoir financer ces prises de participation – c’est-à-dire la nationalisation totale ou partielle de banques par un gouvernement que l’on dit de droite ! – il faut que l’État trouve des ressources.

Étant donné qu’il est peu probable qu’il diminue ses dépenses par ailleurs, il faut bien augmenter les impôts ou emprunter (et donc augmenter les impôts dans le futur).

Quelle que soit la méthode employée, l’État détourne des ressources qui, au lieu de satisfaire les besoins des citoyens, servent à perpétuer les mauvais choix du passé. Et c’est ainsi que, perpétuellement, les individus se voient privés du fruit légitime de leurs efforts : on leur fait payer les erreurs des politiques passées au lieu de leur permettre d’exercer leurs responsabilités.

Pascal Salin, professeur à l’Université Paris-Dauphine
http://www.lecri.fr/Pascal-Salin-une-politique-1150.html

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article