La guerre des microbes du Pentagone-II
La guerre des microbes du pentagone-i
La guerre des microbes du Pentagone-II
LA GUERRE DES MICROBES DU PENTAGONE-III
LA GUERRE DES MICROBES DU PENTAGONE-III (suite)
LA GUERRE DES MICROBES DU PENTAGONE IV à venir
UN GRAND MERCI à TANTE YVONNE
LES SCIENCES DE LA VIE DEVOYEES
L’histoire de l’arme biologique a toujours coexisté avec celles des conflits. Ainsi, les archers de l’antiquité trempaient leurs flèches dans les entrailles des cadavres putréfiés ; des rivières, des sources et des puits étaient empoisonnés par des poisons végétaux ou des carcasses d’animaux en décomposition lors des campagnes guerrières ; des cadavres infectés par la peste étaient catapultés par dessus les remparts des villes assiégées… . Longtemps, ces tentatives sont restées anecdotiques. Le tournant fut pris en 1763, par un officier anglais, avec l’emploi d’une maladie spécifique, la variole, contre les indiens d’Amérique et par le biais de couvertures contaminées. Plus près de nous, pendant la première guerre mondiale, l’Allemagne fut accusée d’utiliser le choléra en Italie, la peste à St Petersbourg, et, d’avoir d’infecté des milliers de mules en Mésopotamie avec le bacille de la morve. En 1929, l’URSS ouvrit un centre de recherche sur les armes biologiques au nord de la mer Caspienne. En 1931, l’armée japonaise créa trois centres spécialisés en guerre biologique et se livra au sein de l’unité 731 du général Shiro Ishii à des expérimentations humaines sur des prisonniers. De 1940 à 1944, l’aviation japonaise répandit la peste sur plusieurs villes de Chine en larguant des bombes à fragmentation ou en porcelaine remplies de bacilles, en lâchant des puces infectées, en même temps que du riz pour attirer les rongeurs. La Grande-Bretagne expérimenta, en 1941-1942, sur l’Ile de Gruinard, des dispositifs de dispersion de Bacillus anthracis. Cette île restera interdite d’accès pendant plusieurs décennies. En 1952, pendant la guerre de Corée, les Américains ont été accusés d’avoir répandu le choléra et des insectes infectés par la peste. En avril et mai 1979, une épidémie inhabituelle de charbon pulmonaire survint à Sverdlosk en URSS, après l’explosion d’un bâtiment militaire.
Les agents biologiques susceptibles d’être militarisés sont des agents vivants ou non, issus du règne animal, végétal ou microbien, provoquant une maladie chez l’homme, les plantes ou les animaux ou une détérioration des matériaux. La définition est étendue aux substances produites par les micro-organismes, animaux et plantes, donc aux toxines et peptides, quel que soit leur mode de production y compris, par conséquent la biogénétique, le génie génétique, la bio-ingéniérie et autres biotechnologies.
Les agents biologiques peuvent être classés en : agents vivants capables de se reproduire par eux même (bactéries, champignons) ; en agents vivants capables de se reproduire uniquement sur une cellule hôte (virus) ; en agents non vivants incapables de se reproduire mais sécrétés par des organismes vivants (peptides, toxines) et en agents non vivants obtenus par synthèse chimique et de structure identique ou très proche des précédents.
Dans le premier groupe susceptible de créer des infections et des épidémies figurent les bactéries, en particulier l’agent du charbon (bacillus anthracis), celui de la peste (yersinia pestis), celui de la tularémie (francisella tularensis) l’agent de la brucellose, de la fièvre Q (coxiella burneti), la coccidioidomycose. Parmi les virus, on compte celui de la variole et des encéphalites (encéphalite à tiques, encéphalite japonaise, encéphalite de Venezuela, fièvre de Chikungunya, d’O Nyong-Nyong, fièvre de la Vallée du Rift et de la Vallée du Nil), de la dengue, de la fièvre jaune et des fièvres hémorragiques dues aux arboviroses (Lassa, Marburg, Ebola), sans oublier les agents agissant sur les plantes (mosaïque du tabac, rouille du blé ou du riz) ou les agents agissant sur les animaux (morve des équidés).
Parmi cette liste de maladies potentielles à usage militaire, les agents suivants, de classe A (haute priorité, facile à produire et à disséminer, transmissible de personne à personne, létalité importante, impact majeur en santé publique, panique et perturbation sociale assurées) l’anthrax, le botulisme, la peste, la variole, la tularémie et les fièvres hémorragiques offrent seuls des utilisations crédibles. Mais le développement de nouvelles armes, lié aux progrès des biotechnologies et de la génétique moléculaire, peut se faire par deux grands moyens : optimisation d’agents déjà connus pour les rendre plus agressifs ou création de nouveaux agents. Les agents naturels évoqués précédemment peuvent être améliorés selon plusieurs modalités : accroissement de virulence, sélection de résistance aux antibiotiques ou dans le milieu extérieur, extension des cibles dans l’organisme, inefficacité vis-à-vis des vaccins existants, tableau pathologique inhabituel, introduction d’éléments génétiques exogènes, expression d’une toxine inhabituelle et enfin par hybridation.
Ont déjà été réalisés l’association combinant la toxine hémolytique du bacille céreus et une souche modifiée de bacillus anthracis pour vaccins ; le croisement de la variole et du virus Ebola ; l’association du virus de la grippe et de la toxine de cobra ; le pox-virus modifié génétiquement ; le mariage des virus de la variole et d’une encéphalite ; le cocktail enterotoxine B staphylococcique et encéphalite équine du Vénézuela… Tous ces cocktails de toxiques, de germes et de toxines ont fait dire au prix Nobel Lederberg que le danger de ces agents était supérieur à celui de la bombe H.
Une arme biologique doit avoir plusieurs composantes : un agent délétère, un vaccin pour parer à l’effet « retour de bâton », un dispositif d’acheminement et un mécanisme de dispersion. Ce dernier point, quand il est exigé du laboratoire de recherches, contractant du Pentagone, est révélateur de l’option offensive du projet. Grâce à la technique de l’épissage des gènes, le biologiste développe un nouvel agent biologique, puis le vaccin. Il aérosolise l’agent, le teste sur des organismes vivants et enfin remet ces unités fondamentales aux militaires qui peuvent alors les produire et les stocker en vue de leur déploiement et usage. Une fois le virus ou la toxine militarisés, il faut un vecteur de dissémination tel qu’une bouche d’aération de métro, un système de ventilation d’immeuble, un avion, le réseau d’eau potable, des produits alimentaires ou encore le circuit postal, ainsi que des conditions favorables (température, soleil, vent, humidité) pour déclencher une hécatombe.
Dans les meilleures conditions possibles, un seul aéronef serait en mesure de disperser des quantités élevées d’agents bactériologiques sur des centaines, voire des milliers de kilomètres carrés par pulvérisation en ligne droite contre le vent depuis la région ciblée. Se défendre contre les agents destinés aux armes biologiques pose un problème, vu la difficulté à déceler leur présence ou à les identifier, les exigences de la prévention (connaître à l’avance le type d’agent, assurer la disponibilité de médicaments efficaces et disposer de suffisamment de temps pour développer une immunité) et le fait que des concentrations suffisamment élevées de l’agent peuvent neutraliser même l’immunité déjà acquise.
Les recherches médicales sur les séquences ADN visent à développer des produits pharmaceutiques capables de combattre les agents pathogènes en se basant sur le profil génétique de ces derniers mais aussi en agissant par rapport au code génétique d’une personne ou d’un groupe humain. En théorie, il est possible de développer un produit bien spécifique pour chaque individu et l’on peut imaginer qu’un traitement visant un groupe d’individus portant les mêmes gènes puisse être produit. Comme il est possible de créer un traitement médical fondé sur la génétique visant une ou plusieurs personnes, il est aussi possible en inversant le processus, de développer un agent pathogène ciblant un groupe humain spécifique. Ce n’est pas un hasard si les militaires ainsi que les services de renseignement du monde entier s’intéressent de près à la cartographie de l’ADN (décodage du génome humain).
Cette idée n’est pas nouvelle. En 1937, les japonais inoculent des virus et des bactéries à leurs prisonniers chinois, russes et américains afin d’en observer les effets selon les ethnies. Leurs travaux ont été récupérés par les américains après la guerre. L’état d’Israël s’est également livré à des recherches permettant le ciblage ethnique (le but étant de développer un agent touchant spécifiquement les arabes) et s’est basé sur des travaux sud-africains qui cherchaient à mettre au point une arme capable de tuer uniquement les individus à peau noire. Il ne faut pas oublier non plus le projet Paperclip, grâce auquel les Etats-Unis se sont garantis les services des plus brillants scientifiques nazis dès 1945, les faisant traverser l’Atlantique pour les faire travailler aux différents projets de guerre que l’armée américaine menait à cette époque. Cela fait donc près de 100 ans que de nombreux gouvernements étudient le moyen de développer des armes nouvelles en se basant sur des réactions chimiques et des séquences d’ADN.
Fin 2001, la société britannique Acambis reçoit une commande de 155 millions de doses de vaccin contre la variole de la part du Département américain de la santé et des services humanitaires. Pourquoi donc le gouvernement américain fait-il un stock de vaccin contre la variole alors que cette maladie est officiellement déclarée éradiquée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 1977 ? Et que seuls deux laboratoires sont dépositaires de ce virus, l’un américain, l’autre russe ? Ces deux laboratoires ont été initialement créés à des fins de guerre bactériologique lors de la guerre froide. Si la variole a disparu, la bataille autour du devenir des stocks de virus conservés continue d’opposer les partisans de leur destruction à ceux de leur conservation. La décision de destruction avait déjà été prise pour 1993. Depuis, elle a constamment été reportée. A l’heure actuelle la décision de la destruction n’est toujours pas prise, elle est fixée à 2011. Pour quels enjeux ?
Certains laboratoires ont manifesté leur opposition en avançant la nécessité de poursuivre les recherches sur ce virus pour la mise au point de tests diagnostiques et ont soutenu l’idée qu’il pourrait être entre les mains d’états peu scrupuleux, voire de groupes terroristes. En juin 2001, trois mois avant le 11 Septembre, les Etats-Unis organisent l’opération Dark Winter, une simulation d’attaque par la variole dans des supermarchés de trois grandes villes américaines. C’est un exercice d’alerte organisé par l’Institut de défense nationale, le Centre de recherches stratégiques international, l’Institut de prévention du terrorisme. Le journal Le Monde du 26 octobre 2001 décrit ainsi l’exercice : « L’attentat ne laissait aucune trace avant qu’une dizaine de jours plus tard les services d’urgence des hôpitaux ne soient submergés de malades. Les personnes contaminées ayant, à leur insu, infectées leur entourage, l’épidémie se serait répandue dans tout le pays avant d’être détectée. En deux mois, elle aurait fait un million de morts. Seul remède, le vaccin antivariolique.
Le gouvernement américain vient donc de décider d’une commande de 40 millions de doses de vaccin qui s’ajouteront aux 15 millions de doses déjà stockées et envisagent de constituer un stock de 300 millions de doses. » Pourtant la variole n’est pas contagieuse pendant l’incubation alors il est impossible que les personnes infectées, mais non malades, contaminent les autres, les critères retenus pour cette stimulation sont manifestement incohérents avec le mode opératoire de la variole. Il a même été envisagé que des terroristes auraient pu se laisser contaminer par la variole puis se promener dans le métro et en ville pendant huit jours afin de contaminer un maximum de personnes. C’est tout à fait contraire aux capacités réduites de contamination de ce virus.
En décembre 2002, le Pentagone révèle ses plans en cas d’épidémie de la variole. Cette autorité militaire argue que, compte tenu du fait que la variole est complètement éradiquée, un seul cas déclaré de cette maladie serait considéré comme résultant d’une attaque terroriste. Le gouvernement américain dit craindre que certaines souches aient pu être volées en Russie et vendues au marché noir à l’Irak. L’armée pourrait être appelée à assurer l’ordre dans les zones où une quarantaine serait imposée, pour le cas où une épidémie de variole éclaterait aux Etats-Unis à la suite d’une attaque bactériologique. Une campagne massive de vaccinations est préconisée, en commençant par les personnels de santé, et jusqu’à 500.000 militaires susceptibles de contracter la variole sur des champs de bataille. La commande du Pentagone inclut également le Vistide, un antiviral censé réduire les effets secondaires de la vaccination antivariolique ou traiter l’infection déclarée. Ce médicament est produit par les laboratoires Gilead Sciences dont le Secrétaire à la défense, Donald Rumsfeld, est le principal actionnaire après en avoir été administrateur jusqu’en 2001.
A la même époque, le journal The Independent rapporte que des scientifiques britanniques ont pour idée d’exhumer les corps de victimes de l’épidémie dite de la « grippe espagnole » qui est le virus de la pandémie la plus mortelle de l’histoire récente. (En quelques mois seulement de l’année 1918, la pandémie fit plus de victimes que la première guerre mondiale qui se terminait cette même année). Depuis 1997, de leur côté, deux groupes de biologistes moléculaires et de virologistes américains, dirigés par le docteur Jeffery Taubenberger (Institut de pathologie des forces armées, Washington) sont sur la trace de ce virus et ont annoncé en avoir retrouvé des fragments dans des tissus prélevés chez un américain mort de cette grippe, à l’âge de 21 ans, en 1918, en Caroline du Sud. Ils sont parvenus à recréer en laboratoire le virus et espèrent que ces résultats aideront à établir les bases moléculaires de la pathogénicité virale et, ainsi, à faciliter la mise au point de vaccins et de médicaments efficaces. Ils ont établi ainsi qu’il s’agissait d’un virus d’origine aviaire de sous-type H1N1.
Selon le docteur Taubenberger, la pandémie de « grippe espagnole » a démarré en mars 1918 au Kansas dans l’une de ces fermes où existait alors une grande promiscuité entre canards, porcs et éleveurs. Cette variante de la grippe aurait donc trouvé le moyen de passer de l’animal à l’homme par le biais d’une mutation. Les chercheurs américains ont ensuite retrouvé la trace du même virus en Alaska, dans les tissus pulmonaires d’une femme décédée en 1918. Avec l’aide des techniques sophistiquées de la génétique inverse, ces chercheurs ont pu identifier les huit gènes du virus. Ils ont également réussi à créer ce matériel génétique "nu" qui, intégré à des cellules rénales humaines en culture, a permis, en quarante-huit heures, de recréer un agent pathogène que l’on croyait disparu depuis quatre-vingt-cinq ans. Exhumer des corps pour obtenir un échantillon d’un virus disparu depuis près de cent ans et prendre le risque de faire resurgir l’épidémie … à quoi jouent donc ces apprentis sorciers ?
La fièvre espagnole
En 2002, apparaît la pneumonie atypique, le SRAS, en Chine dans les environs de Hong-Kong. Entre le début novembre 2002 et début juillet 2003, elle touche presque 8500 personnes et fait 916 décès. En septembre 2003, de nouveaux cas apparaissent à Singapour, la cause de ce rebond semble due à un mauvais confinement du virus en laboratoire. Cette épidémie survient au moment même où est lancée la guerre totale contre le terrorisme, et la guerre Anglo-Américaine contre l’Irak sous prétexte que Saddam Hussein aurait accumulé un arsenal d’armes bactériologiques. Cette épidémie émergente complète opportunément les effets de la campagne contre le bioterrorisme. A l’époque, l’OMS lance un plan de crise pour éradiquer l’épidémie de pneumonie atypique. Davis Heymann, de l’OMS, déclare, à propos de la pneumonie atypique : « Nous n’avons jamais rencontré une épidémie aussi généralisée, à une aussi grande échelle ». Le Dr Stohr, virologue de l’OMS en charge de la coordination internationale des laboratoires, ajoute : « C’est la première fois qu’un réseau mondial de laboratoires échange ainsi des informations, des échantillons, des prélèvements sanguins et des images. Il n’y a plus de secrets, plus de jalousie, ni de compétition, face à une telle urgence sanitaire mondiale. C’est un réseau phénoménal ! ».
Entre temps, en avril 2003, un pavé dans la mare des communiqués des autorités provient de Russie. D’après Sergei Kolesnikov, membre de l’académie de Médecine, le virus est un cocktail de ceux de la rougeole et des oreillons, mélange qui ne peut pas apparaître spontanément dans la nature. « Nous ne pouvons l’obtenir qu’en laboratoire » a-t-il confié à l’agence de presse RIA Novosti lors d’une conférence à Irkoutsk en Sibérie. A son avis, il s’agirait d’une arme bactériologique échappée d’un laboratoire et il existerait nécessairement un antidote tenu secret. Le Dr Nikolai Filatov, qui dirige les services d’épidémiologie de Moscou a, de son côté, confié au quotidien la Gazeta que la maladie a été fabriquée. De même, l’Institut of Science in Society de Londres évoque la possibilité que des expériences de génie génétique aient pu créer le virus de la pneumonie atypique, même par inadvertance. Il n’a cependant pas été jusqu’à envisager ouvertement l’hypothèse d’une création intentionnelle comme les scientifiques russes.
Dernier rebondissement, le 7 octobre 2008, le chef de la sécurité nationale de Taïwan déclare qu’il n’était pas exclu que l’épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère de 2002 ait eu pour origine des recherches menées par Pékin sur les armes biologiques. Il a cependant reconnu qu’il n’avait pu recueillir aucune preuve à l’appui de cette thèse. Cette accusation est portée dans un contexte de conflit larvé entre la Chine et les Etats-Unis.
Que ce virus ait été relâché ou qu’il se soit échappé importe peu au final. Sa propagation mondiale permet d’évaluer le temps de réponse des laboratoires de l’OMS ainsi que ceux des pays technologiquement avancés face aux armes bactériologiques. Un virus faiblement létal de fabrication humaine, c’est l’ídéal pour étudier le mode et la vitesse de propagation d’une arme virale.
LE BOUCLIER BIOLOGIQUE, ILLUSION OU ALIBI ?
Aucun état ne peut s’engager dans un programme d’utilisation offensive des armes biologiques sans s’assurer au préalable que sa population civile est protégée, ou plus précisément que soit maintenu un ordre civil efficace capable de conserver l’infrastructure nécessaire au fonctionnement du programme. Il serait suicidaire et criminel de la part de l’administration Bush de lancer une guerre biologique dite « préemptive» sans avoir mis en place au préalable un programme de « Défense Civile ». Celui-ci est en marche forcé depuis 2003.
Annoncé à grand renfort de déclarations mobilisatrices pour contrer les effets d’une éventuelle attaque bio-terroriste sur le sol américain, un programme massif de Biodéfense est lancé, coordonné par le Homeland Security Service. L’organisme public National Institute of Allergy and Infection Diseases (NIAID) qui fait partie du réseau des centres de recherche spécialisés dans la santé aux Etats-Unis (National Institutes of Health), est en première ligne de ce programme qui comprend trois volets essentiels : développer des parades thérapeutiques contre les principaux agents pathogènes connus, constituer des stocks stratégiques de vaccins et de médicaments et mettre en place des structures d’intervention rapide. Ce programme a été doté de la somme considérable de près d’une centaine de milliards de dollars sur 10 ans. Une part importante de ces crédits est allée au projet BioShield (bouclier biologique). Inauguré en 2004, il s’appuie sur diverses entreprises pharmaceutiques faisant d’elles des partenaires de défense. Celles-ci sont chargées de produire des produits permettant de faire face aux principaux risques qui seront stockés au Strategic National Stockpile. Sept produits ont été retenus : bacille du charbon, variole, tularémie, toxine botulique, fièvres hémorragiques et peste. Ces maladies sont propagées par des germes (bugs) spécifiques, pour lesquels il faut concevoir des remèdes (drugs) spécifiques. Le projet Bioshield repose donc sur le principe : « one bug, one drug ». Ainsi des millions de doses de vaccins contre l’anthrax ont été fabriquées, à l’usage prioritairement des forces de sécurité et de défense.
Mais les entreprises pharmaceutiques ne se sont pas empressées de répondre aux appels d’offre, celles-ci préférant investir sur des produits de grande consommation plutôt que dans la prévention de maladies encore inconnues ou peu probables. Ainsi Marie Vodicka de la Pharmaceutical Research and Manufacturers of America déclare : « La vocation de nos compagnies est de subvenir aux besoins actuels en matière de santé et ce facteur doit être pris en compte lors de l’examen des menaces théoriques futures. »
Mais c’est au tour du Center for Biosecuriy de l’université de Pittsburgh de tenir un discours alarmiste en prévenant que les Etats-Unis restaient incapables de se prémunir contre les effets d’une attaque un tant soit peu consistante à l’anthrax. Le gouvernement exerce une pression acharnée pour développer son programme. Outre les laboratoires fédéraux largement sollicités, les industriels de la pharmacie sont vivement encouragés à participer à cette croisade contre ces nouveaux ennemis de la nation. Pour permettre aux grandes entreprises du secteur pharmaceutique, et accessoirement à celles qui fournissent des équipements de protection de faire face à leur devoir patriotique sans redouter d’être mises en cause en cas de problème avec l’un de leurs produits, la loi sur la Homeland Security prévoit de réduire considérablement leur responsabilité. Elles peuvent ainsi fournir à l’armée ou aux services publics n’importe quel produit défectueux, vaccin dangereux ou médicament mortel, sans courir le risque d’un procès ruineux. « Cela doit être un partenariat public privé pour être efficace », résume Anthony Fauci, principal architecte de BioShield. Pour convaincre les « big pharmas », Washington leur consent des conditions très favorables. L’Etat fédéral s’engage à acheter et à stocker les médicaments qui sortiront des laboratoires. Parallèlement, le NIAID entend procéder au séquençage des génomes des principaux agents pathogènes connus. Ces travaux sont eux aussi considérés comme très stratégiques. Pour preuve, les membres participant à la commission intergouvernementale créée dans ce but : le DoD, la CIA, le FBI, la National Science Foundation et le NIAID.
Project BioShield Act of 2004
Les spécialistes du bio-terrorisme dénoncent le côté illusoire voire dangereux d’un tel programme car la production des vaccins à grande échelle multiplie les risques d’évasions accidentelles ou criminelles. Quant à la pertinence du plan lui-même, plusieurs observateurs estiment que des bio-terroristes motivés et compétents feraient probablement appel à des souches génétiquement modifiées et par définition sans antidote connu. Une meilleure solution serait de développer des remèdes à large spectre actif contre une grande catégorie de virus et microbes. Une approche défensive sur le modèle du remède à large spectre demande des recherches fondamentales approfondies, afin de définir des structures et fonctions communes entre différents pathogènes, eux-mêmes susceptibles de muter spontanément ou artificiellement. Il ne s’agirait plus par ailleurs seulement de prévenir mais de réagir après contamination. Les autorités sanitaires américaines semblent avoir compris l’intérêt de cette démarche car le DoD vient de lancer une nouvelle initiative dite « Transformational Medical Technologies Initiative ». Mais le projet Bioshield présente une autre faiblesse. Quels que soient les remèdes développés, encore faudrait-il les distribuer en temps utile aux populations. Le Strategic National Stockpile devrait en effet, en cas d’offensive bio-terroriste, distribuer très rapidement à plus de 3.000 administrations de terrain le remède adapté. Or ces administrations ont été laissées dramatiquement à l’abandon. Ni leurs effectifs ni leurs méthodes de travail ne leur permettraient de réagir efficacement comme cela a déjà été constaté à la suite de l’ouragan Katrina. Le projet Bouclier Biologique est marqué par des retards et des problèmes opérationnels et le 12 décembre 2006, le Congrès adopte une loi approuvant un budget d’un milliard de dollars US pour financer trois années de recherches supplémentaires par le secteur privé sur ce programme.
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