Le président du procès Colonna a été écarté des cours d'assises

Depuis plusieurs semaines, le premier président de la cour d'appel de Paris, Jean-Claude Magendie, a décidé de remplacer les présidents d'assises, en place depuis plus de sept ans - une réforme désavouée par l'assemblée générale de la cour. Toutefois, après le déroulement chaotique et contesté du procès Colonna, cette décision passe pour un désaveu sur la manière dont M. Wacogne a conduit l'audience de la cour d'assises spécialement composée. Elle conforte les partisans d'Yvan Colonna qui, depuis l'annonce de sa condamnation à la réclusion à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 22 ans, multiplient les manifestations. M. Wacogne avait été choisi au printemps 2008 par M. Magendie, en lieu et place d'un autre président, Alain Verleene, lui aussi écarté de la cour d'assises de Paris.
D'une bonhomie apparente, ne se départissant jamais de son calme, M. Wacogne a été plusieurs fois bousculé par les défenseurs d'Yvan Colonna. Après deux semaines d'audience, ces derniers avaient déposé une requête en révocation, accusant M. Wacogne de "partialité" et de "déloyauté". Celle-ci avait été rejetée par la cour d'appel. Toutefois, ce soutien n'avait pas suffi à rétablir son autorité, largement entamée.
Les avocats du berger de Cargèse, qui ont déposé lundi 30 mars un pourvoi en cassation, ont reproché à M. Wacogne de dissimuler des pièces. Ainsi, le 13 février, à la suite de la déposition de l'ancien secrétaire général adjoint de la préfecture de Corse, Didier Vinolas, M. Wacogne n'avait-il pas fait état d'une lettre qui lui avait été adressée quelques semaines avant l'ouverture des débats. Dans cette missive, M. Vinolas alertait le président de la cour qu'il s'apprêtait à faire des révélations susceptibles de bouleverser l'accusation. Après de multiples incidents et demandes, l'accusé et ses avocats avaient quitté l'audience le 11 mars.
La mise à l'écart du magistrat intervient dans le cadre d'une réorganisation de la cour d'appel de Paris, contestée par les syndicats de magistrats, en différents pôles (famille, grande délinquance organisée, etc.). Elle aboutit à une séparation en deux de la cour d'assises, une partie des juges se spécialisant dans les affaires de grande délinquance et terrorisme, les autres traitant des autres affaires criminelles, principalement les viols. D'autres magistrats sont sur la sellette, comme Dominique Coujard, président du premier procès Colonna et membre du Syndicat de la magistrature (SM, gauche), qui s'est heurté à plusieurs reprises à Jean-Claude Magendie, irrité par certaines de ses prises de position publiques.
Cette controverse sur le procès Colonna arrive trois mois après celle qui a suivi le procès d'Antonio Ferrara. A l'automne 2008, la conduite de cette audience par Janine Drai avait fait l'objet de nombreuses contestations des avocats, nécessitant l'intervention du procureur général de Paris, Laurent Le Mesle.