Plan Alzheimer et conflits d'intérêts:...

Publié le par sceptix

 ...les Sarkozy, Sanofi, recherche publique, franchises médicales... Les deniers publics feront les profits privés
source :  http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2009/03/05/alzheimer-nouvelle-fondation-de-cooperation-scientifique-mai.html

L’un des principaux symptômes de la maladie d’Alzheimer, c’est une altération de la mémoire. Exerçons-là un peu, alors. Pour voir comment les maillons de la chaîne politico-sanitaire s’enchevêtrent avec les gros intérêts privés de l’industrie pharmaceutique, et ce depuis la famille Sarkozy jusqu’à notre firme nationale, Sanofi Aventis. L’imbrication est parfois directe, parfois par maillons interposés, comme il se doit dans tout réseau.

Non, la maladie d’Alzheimer ne semble pas avoir été choisie par hasard par Nicolas Sarkozy, et ses accents de compassion pour les personnes âgées ne semblent pas non plus être l’expression d’un pur lyrisme.


La Fondation de la coopération scientifique sur la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées

Le premier conseil d’administration de la "Fondation de la coopération scientifique sur la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées" a eu lieu le 7 novembre 2008, présidé par Philippe Lagayette, désormais "vice-président de la banque JP Morgan pour la région EMEA" et "président du groupe dédié aux fonds souverains en Europe". Les banquiers et l’Alzheimer, par les temps qui courent, est-ce vraiment une sage association ? Espérons que M. Lagayette ne nous créera pas une "bulle Alzheimer" oublieuse de la raison et faisant des investissements à risque au travers de hedge funds pour lequel seul le profit est "souverain"…

Je propose qu’un collectifs de médecins et d’usagers indépendants de tous bords testent régulièrement les capacités cognitives de tous ceux qui sont impliqués dans la gestion tant financière qu’intellectuelle et scientifique de la "grande cause Alzheimer".

La précaution ne serait pas inutile. Parce que, décidément, il doit y avoir une affinité secrète entre les fonds souverains – destinés à maîtriser la crise financière - et les firmes pharmaceutiques. Une alchimie et des covalences inaccessibles à l’usager lambda qu’est Pharmacritique… Parce que Jean-François Dehecq (patron de Sanofi-Aventis) navigue lui aussi dans ces eaux-là ; il a été nommé par Sarkozy président du conseil d’orientation du "fonds souverain à la française" (voir notre note)…

Voilà, avec Lagayette, encore un exemple du mélange malsain des genres et de la promiscuité entre finances publiques et privées et grands laboratoires privés… Et tout cela pour la philanthropie, bien sûr… Mais cela n’est pas tout, comme on le verra en tirant sur juste une ou deux mailles du filet.

Le directeur général de la Fondation est le Pr Philippe Amouyel, qui dirige l’Institut Pasteur de Lille. Cette institution est, selon ce portail régional, "le partenaire de nombreuses firmes pharmaceutiques des États-Unis et d'Europe". Un petit détail.

La Fondation de la coopération scientifique s’inscrit dans le cadre du plan "Alzheimer 2012" et se propose de soutenir la recherche, notamment en matière de médicaments, comme on le voit par la présence des firmes Sanofi-Aventis, Merck Sharp & Dohme, Servier et Ipsen, qui, nous dit pudiquement le Panorama du Médecin du 17 novembre 2008, "participent au développement de cette fondation". En fait, ils "sont d’ores et déjà membres fondateurs" et "ont siégé au premier conseil d’administration", nous apprend le communiqué de presse du 13 novembre de Sanofi Aventis. Tout le monde se félicite de cette "contribution financière" et "des échanges étroits [qui] seront organisés entre la sphère académique et la sphère privée au travers de la Fondation."

(Lorsqu'on connaît le respect de Sarkozy et des banquiers pour la "sphère académique", on peut craindre le pire... Voir les notes de la catégorie "Université SARL. Partenariats public-privé").

L’exemple du "partenariat" public-privé Innovative Medicine Initiative

En fait, on ne devrait pas parier que le privé apporte plus qu’il n’emporte dans cette juteuse affaire de "mise en commun" des connaissances, surtout si elle se fait sur le modèle conçu par notre vénérable Commission européenne, dont tout le monde connaît le dévouement à la cause de l'intérêt général et des services publics. Pharmacritique a décrit ce modèle dans la note "Innovative Medicines Initiative: la Commission européenne et EFPIA s’allient pour dévaliser la recherche et les deniers publics"… Sous couvert de financements privés, d’apport de liquide et d'investissements. Où que l'on se tourne, on tombe toujours sur les "investissements" pharmaceutico-bancaires, sur la même pensée unique dont nous vivons les effets en ce moment même. (L'EFPIA est l'organisation patronale européenne de l'industrie pharmaceutique).

Ce modèle de pseudo-partenariat est un moyen parfaitement légal pour que le privé s’approprie les résultats des investissements étatiques traduits dans la recherche publique, en les brevetant pour s’assurer des profits considérables, protégés par des lois de propriété intellectuelle qui ne sont pas taillées pour les petits. Il suffit de lire – dans la note déjà citée - les critiques adressées par l’union des sociétés publiques de recherche allemandes, la Helmholtz Gemeinschaft, aux autorités européennes responsables d’Innovative Medicine pour se convaincre que tout est calculé jusque dans le moindre détail pour spolier le public et enrichir les firmes privées et leurs actionnaires.

L’alliance pharmaceutique française se préparait pour l'investissement Alzheimer et n’attendait que de pouvoir se déployer à plus grande échelle

Prenons juste un exemple, assez représentatif, semble-t-il.

Regardons cette dépêche de Sanofi annonçant déjà en novembre 2006 ce qui se préparait déjà : "Sanofi-Aventis, Innogenetics et l'Inserm signent un accord de collaboration dans la maladie d'Alzheimer", et dans des conditions très strictes de partage de la propriété intellectuelle : tout va aux deux firmes privées, l’institution publique (Inserm de Lille) aura simplement de quoi financer les recherches commanditées par les deux autres… "Cet accord est conclu pour une période initiale de 2 ans, avec la possibilité pour Sanofi-Aventis d'obtenir une licence mondiale exclusive sur les résultats de ce programme de recherche dans le domaine thérapeutique. Innogenetics disposera d'une licence mondiale exclusive dans le domaine du diagnostic.

Le présent accord se fonde sur l’accord de propriété intellectuelle et de collaboration dans le domaine de la recherche, conclu en 2002 entre Innogenetics et l'Inserm de Lille (U-422) pour le développement de nouveaux outils de diagnostic de la maladie d'Alzheimer. Les résultats de la collaboration permettront d'étudier le rôle de formes spécifiques du peptide bêta-amyloïde, peptide essentiel dans la pathogenèse de la maladie d'Alzheimer, ainsi que des technologies associées, en vue de découvrir de nouvelles pistes thérapeutiques pour le traitement de la maladie. Sur la base des technologies et des produits d’Innogenetics et de l’Inserm, Sanofi-Aventis évaluera différents candidats produits contre des formes variées du peptide, dans un programme d’immunisation passive.

Innogenetics et Inserm Transfert fourniront l’accès à leurs technologies et services à Sanofi-Aventis et recevront en échange un paiement initial et un financement de leurs activités de recherche. (…) Les termes financiers de l’accord ne sont pas révélés."

Je cite à dessein la phrase concernant les plaques amyloïdes, parce que j'aurai l'occasion de revenir là-dessus dans un prochain billet.

S'approprier les innovations de la recherche publique et en tirer des profits

Clair comme de l’eau de… roche : le public donne tout, le privé empoche les bénéfices… Les critiques de la Helmholtz Gemeinschaft étaient parfaitement justifiées et s’appliquent ici aussi, comme à toute forme de "partenariat public-privé" tellement vanté et qui sont très prisés par les firmes pharmaceutiques dont les pipelines sont vides depuis longtemps. Les pipelines ne crachent plus que des écrans de fumée, ne produisent justement plus de médicaments apportant un progrès thérapeutique, comme nous le disions dans cette note, à partir de la Déclaration de 2001 de l’ISDB (International Society of Drug Bulletins) : "Progrès thérapeutique? Ou inflation marketing et occultation des effets indésirables des médicaments? Déclaration de l’ISDB".

Pharmacritique a abordé cet aspect aussi pour épingler la servilité de nos autorités d’(in)sécurité sanitaire (AFSSAPS, HAS) face aux firmes pharmaceutiques, puisqu’elles permettent à presque n’importe quoi d’être commercialisé en France : "Progrès thérapeutique nul en 2008, dit Prescrire. Multiples critiques des procédures d'AMM, responsables de l'inflation de médicaments dont le bénéfice clinique n'est pas évalué".

Le plan Sarkozy arrive et amène des fonds publics pour les firmes privées. Franchises comprises

L’élection de Sarkozy et la propulsion de Jean-François Dehecq au plus haut niveau des finances publiques et du carnet d’adresses politiques - si tant est qu'il en eût besoin - s’inscrit dans une stratégie qui semble très bien pensée et déployée… (Notons d’ailleurs la difficulté de critiquer les produits de Sanofi, par exemple le Gardasil… A moins que la contestation vienne d’ailleurs, comme pour Accomplia (rimonabant), qui avait été refusée par l’agence américaine du médicament (FDA), puis retiré par d’autres pays… Autrement, c’est motus et bouche cousue, et on verra que la famille Sarkozy elle-même peut dépêcher, si besoin, des consultants et des experts pour rétablir les dogmes).

Sarkozy parlait de l’Alzheimer depuis sa campagne électorale ; mais si les firmes privées étaient vraiment là pour apporter des financements à cette cause (par ailleurs très respectable, là n’est pas la question) et non pas pour piller les résultats de la recherche financée par le contribuable, il n’y aurait nul besoin du prétexte des franchises médicales pour financer les recherches sur l’Alzheimer…

Mais qui va fouiller dans tous les détails et (se) poser les questions qui fâchent ? Payons les franchises, faisons un effort pour renflouer ces pauvres actionnaires des laboratoires privés – français et étrangers, vu la présence de Merck et d’autres qui ne sont pas nommés -, qui auront des droits et des brevets exclusifs sur les résultats de la recherche ! Et en bons pigeons que nous sommes toujours, malgré des mauvaises expériences répétées, nous payerons encore une fois pour les médicaments…

Sarkozy encore… Mais François Sarkozy… Et l’extension médiatique et entrepreneuriale directe des conflits d’intérêts

Où l'on voit que la stratégie est meilleure et quasiment invisible lorsqu'elle est pensée et mise en place par des professionnels.

L’une des membres du conseil d’administration de la Fondation de la coopération scientifique est la Pre Françoise Forette, directrice de la Fondation nationale de gérontologie  et de l’International Longevity Center France (ILC-F).

Intéressant, ce Longevity Center, car il a des ramifications politiques et médicales insoupçonnées par le quidam… Ainsi, le ILC-F a organisé le 13 novembre 2008 "Les 15èmes rencontres parlementaires sur la Longévité", sous le patronage du président de l’Assemblée nationale (Bernard Accoyer) et en présence, entre autres, de Roselyne Bachelot, de plusieurs députés, mais aussi de Bruno Rivals, directeur des Relations politiques à Pfizer France…

Notons aussi un nom familier et très engagé, lui aussi présent : il s’agit du Dr François Sarkozy, qui a délaissé la pédiatrie au nom de son amour pour l’industrie pharmaceutique et pour la gériatrie qui l’a même poussé à fonder une chaîne de télévision sur internet appelée LongeviTV. Dont l’un des financeurs / sponsors est Sanofi Aventis.

Annonçant la future chaîne de télévision, et avec l'attitude critique qu'on lui connaît, Le Figaro titrait le 16 avril 2008 "François Sarkozy, un parcours sans faute dans la santé". On y apprenait la reconversion "dans le conseil en stratégie et en organisation, [puisque François Sarkozy] vient de prendre la présidence d'AEC Partners, important cabinet œuvrant dans le domaine de la santé, dont il est associé depuis 2001". Le Figaro nous apprend "que l'industrie pharmaceutique [le] happa rapidement", ce qui est naturel pour celui qui se reconnaît "une âme d’entrepreneur" : "De Roussel Uclaf à [Sanofi] Aventis en passant par Hoechst Marion Roussel, diplôme de l'Insead en poche aussi, il y a imprimé sa marque en France et à l'international durant dix ans. Il est aussi depuis 2005 vice-président du conseil de la société de biotech cotée Bio Alliance Pharma." On peut dire donc que côté stratégie, il s'y connaît.

AEC Partners et l'industrie pharmaceutique

Comme on s’y attendait, AEC Partners a pour clients l’industrie de la santé et des soins ainsi que l’industrie des "sciences de la vie", mais la firme conseille aussi des fonds d’investissements "majeurs", lit-on sur cette page. Encore un rapport direct aux banquiers et autres investissements. Décidément, il faudrait parler du complexe médico-pharmaceutico-bancaire, si l’on pense aussi aux enchevêtrements des membres de l’Assemblée Nobel dans le Fonds d’investissement du Karolinska Institut et et leurs activités semblables à celles de François Sarkozy. Voir à ce sujet l’enquête très détaillée de Pharmacritique sur les conflits d’intérêts, les liens financiers directs et indirects et les soupçons de corruption pesant sur l’Assemblée Nobel, qui ont entaché le prix Nobel attribué à Harald zur Hausen par des considérations bassement matérielles (augmenter les ventes du Gardasil et museler la critique).

Sur cette page, on peut lire que l’offre en consulting d’AEC Partners correspond tout à fait "aux besoins de l’industrie pharmaceutique, tout au long du cycle de vie d’un produit" : c’est-à-dire depuis la conception, le développement, les essais, le marketing, l’écriture des articles médicaux, la présentation, la publicité, les dossiers d’obtention d’autorisation, la publicité auprès des médecins et indirectement auprès des patients, la formation médicale continue, les congrès, la bataille pour les prix ou pour l’extension des indications…

Bref, des consultants et des experts et expertises sont prêts à l’emploi pour mener à bien tout projet lié aux médicaments des firmes pharmaceutiques clientes de François Sarkozy. Mais AEC Partners s'occupe aussi des fusions-acquisitions (M&A : mergers and acquisitions), domaine dans lequel la firme dirigée par le frère du président Sarkozy se reconnaît même des "connaissances stratégiques" qui s’ajoutent à l’expertise transactionnelle… Pour ma part, je le crois sur parole. Pas vous?

Les clients et "partenaires stratégiques", c'est la classe! Rolex assuré bien avant 50 ans!

On ne sera pas étonné de voir que l’Institut Pasteur de Lille - dirigé par Philippe Amouyel, devenu directeur de la "Fondation de la coopération scientifique sur la maladie d’Alzheimer" - fait partie des clients d’AEC Partners, Mais c'est un tout petit, que je mentionne parce qu'il fait partie du réseau. Mais avec Pfizer, on change de catégorie. Et lorsqu’on regarde qui sont les "partenaires stratégiques internationaux", alors là... Bristol Myers Squibb, Glaxo Smith Kline... Puis le Frankel Group, lui-même spécialisé dans toutes les questions stratégiques, de conseil, d’analyse et d’investissement des "intervenants dans l’industrie de la santé". Ces intervenants sont les grandes firmes pharmaceutiques et les grandes sociétés de recherche sous contrat (CRO : contract research organisations ou sous-traitants des gros laboratoires), lit-on sur cette page

Et il n’est nulle part question de conflits d’intérêts…

Quel vocable odieux lorsqu'il s'agit de philanthropie et de soigner des personnes âgées!

Mais c’est une habitude chez nous, dans ce pays des dynasties, malgré les apparences républicaines. Bernard Kouchner et Gérard Kouchner en santé les illustrent eux aussi très bien. L’un ministre - de la santé ou autre -, l’autre patron de la presse médicale publicitaire et gratuite, dont Pharmacritique a commenté la qualité et l’indépendance (sic) dans la note "Presse médicale : nos généralistes sont en bonnes mains pour le lavage pharmaceutique du cerveau. Jugez par vous-mêmes".

Et puis, dans un autre domaine, Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’Etat à l’économie numérique, et son frère, Pierre, dont les activités entrepreneuriales se déroulent dans ce domaine et qui s’est même fendu d’un rapport sur la question, commandé par le gouvernement, comme nous le rappelle Marianne.

La liste pourrait être tellement longue…

Education thérapeutique sarko-aventiste et propagande directe sur LongeviTV

Revenons à François Sarkozy et à Sanofi Aventis, qui se rencontrent (aussi) à la télé…

Bien entendu, les "programmes de prévention" et autres actions de Sanofi Aventis sont fort bien représentés et mis en avant sur LongeviTV, par exemple à partir de cette page, sur laquelle on peut visionner six vidéos, dont certaines traitent directement de la maladie d’Alzheimer. On nous fait l'éducation thérapeutique, c'est certain, démocratiquement répartie et pas réservée aux étudiants en médecine... L'usagère lambda qu'est Pharmacritique apprend ainsi ce qu’il en est des plaques amyloïdes et des neurofibrilles Tau (ou enchevêtrements neurofibrillaires), vous avez vu à quel point l'éducation est efficace? On nous appâte avec des allusions vagues aux fabuleuses pistes de recherche de Sanofi, de façon purement publicitaire et propagandistique.

Tout pour les médicaments, tout pour les profits. Rien ou presque pour l’humain, pour l’accompagnement

Comment des laboratoires tels Sanofi Aventis, bénéficiant qui plus est de tels appuis politiques jusqu'à la présidence, pourraient-ils abandonner à d’autres firmes ce marché aussi lucratif du vieillissement, de l’Alzheimer ou d’autres démences ? Ou alors laisser le commerce connexe à d’autres fabricants de produits dérivés ?

Aucun des médicaments prescrits actuellement (Exelon (rivastigmine), Reminyl (galantamine), Aricept (donépézil), Ebixa (mémantine)), aucun de ces inhibiteurs de la cholinestérase ou alors la mémantine n’est produit par les laboratoires qui s’engagent dans la Fondation… Il y a donc un retard à rattraper, et il faut beaucoup d’investissements (impôts, franchises, résultats des recherches publiques…) pour y arriver… Mais avec Nicolas Sarkozy, tout est possible, non ?

Ces médicaments ont par ailleurs une efficacité fort douteuse, un service médical rendu que même la très généreuse HAS (Haute Autorité de santé) a qualifié de faible, ce qui n’empêche pas des chiffres d’affaires très juteux…

C’est là le point névralgique de cette Fondation comme des tentatives précédentes : on gaspille énormément d’argent – et qui plus est à partir d’une hypothèse qui pourrait se révéler bien moins sûre que prévue au lieu de soutenir les accompagnants, d’investir dans des lieux d’accueil et dans du personnel qualifié capable d’apporter à ces malades à la fois l’humanité indispensable et l’interaction qui permet de maintenir peu ou prou les capacités intellectuelles en éveil et de ralentir leur dégradation.

Le pharmacologue allemand et rédacteur de la revue Arznei-Telegramm Pr Peter Schönhöfer, dont la réputation n'est plus à faire, a par ailleurs dénoncé plus d'une fois cet état de choses et ce gaspillage - en médicaments inutiles - qu'il a chiffré par ailleurs a plusieurs centaines de millions d'euros par an. Pharmacritique reviendra là-dessus.

On peut donc s’attendre à ce que la compétition des pharmas devienne encore plus acharnée pour sortir en premier une molécule qui montrerait l’ombre d’un début d’un effet sur les capacités cognitives, et particulièrement sur la mémoire… Car acharnée, elle l’est déjà, comme nous l’avons dit dans une note qui rendait compte de quelques études publiées en série et présentées comme révolutionnaires, rien qu’en l’espace d’une semaine : "Alzheimer : Des effets d’annonce déments sur des vagues espoirs de traitement. La médecine perdrait-elle la raison en plus de l’éthique?"

Oui, la société perd la raison, et la médecine la perd à son tour, lorsqu’elles permettent – lorsque nous tous permettons - que de telles affaires, qu’un tel commerce se fasse sur le dos de nos grands-parents.

Les plus fragiles – et surtout ceux qui ne peuvent plus parler pour eux-mêmes - devraient être les plus protégés. Mais où est l’éthique médicale, où est la morale, lorsque, faute de personnel, on gave ces personnes âgées de neuroleptiques, de tranquillisants et aussi d’antipsychotiques dont on sait pourtant qu’ils augmentent les risques de mortalité cardiovasculaire, par exemple ?

Seules les firmes pharmaceutiques et leurs alliés politiques sortent financièrement gagnants de ce commerce. Nous, la société, nous y laissons de plus en plus de parcelles de notre humanité.

Une remarque encore

Bien entendu, on pourrait encore creuser et chercher les conflits d’intérêts de ceux qui sont impliqués dans cette Fondation, chercher les liens financiers des associations de patients avec l’industrie pharmaceutique, etc. Il n’y a aucune raison que les conflits d’intérêts des associations de malades d’Alzheimer et de leurs familles soient moindres en France qu’au Canada ou qu’en Suisse, comme le montrent les notes de Pharmacritique sur les "Conflits d’intérêts des associations / corruption" et tout particulièrement l’enquête du journal suisse de défense des consommateurs "Der Beobachter" sur le financement des associations de patients par l'industrie pharmaceutique.

Mais il s’agissait ici simplement de montrer que l’exemple vient d’en haut et de se poser la question du choix de l’Alzheimer comme "le chantier" santé, ainsi que de s’interroger sur les étonnantes "coïncidences" et opportunités politico-médiatiques et financières que l’on retrouve lorsqu’on exerce tant soit peu ses capacités cognitives…
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P
Rebonjour,Je viens de laisser un message à la suite d'un autre texte copié de notre blog Pharmacritique: "Merck et Elsevier ont édité une fause revue médicale: publicité pour Fosamax et Vioxx. Ghost management révélé lors du Vioxx", publié à l'adresse suivante": http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2009/05/10/paye-par-merck-elsevier-a-edite-une-fausse-revue-medicale-ou.htmlIl s'agit là, comme dans cet article-ci, d'un travail d'investigation approfondi, qui a pris beaucoup de temps à l'auteur, et je trouve que ces efforts méritent respect. Cet article-ci s'intitule "Plan Alzheimer et conflis d'intérêts. Les Sarkozy, Sanofi, les franchises médicales, la recherche publique... Les deniers publics feront les profits privés", et il a été publié sur Pharmacritique ici: http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2009/03/05/alzheimer-nouvelle-fondation-de-cooperation-scientifique-mai.htmlJe vous demanderais de respecter la nétiquette, l'auteur et le blog, en utilisant des guillemets, en précisant dès le départ le nom de l'auteur et l'endroit de parution, par un lien actif. De même, il est préférable de ne pas toujours citer les textes entiers. Je vous prierais d'appliquer ces règles à tous les textes tirés de Pharmacritique. (je pense que le plus correct serait de faire de même avec les autres). On donne juste les sources à la fin lorsqu'on fait un article original qui s'inspire pour certains aspects d'autres articles. Mais même là, les liens actifs sont à utiliser, selon la licence Creative Commons. Je rappelle que notre blog n'est pas sous cette licence de reproduction libre avec les mentions en question au départ. Donc les droits d'auteur s'appliquent. Je me répète, mais j'ai l'impression que le commentaire précédent n'est pas passé. Désolée. C'est sans hostilité aucune. Mais on nous a trop copié et même plagié, sans mention aucune, et je trouve que c'est un comportement qui ne doit pas être encouragé. Bonne continuation pour votre blog!Bien à vous.
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S
Oh, Charlotte, on ne gave pas seulement les malades de neuroleptiques et de tranquillisants... ! On les gave tout court ! On entretient " la vie " jusqu'au bout ( mais quelle vie ? ) et ça dure de nombreuses années, pendant lesquelles les familles souffrent en silence...! On s'en fout, ça ne fait pas de bruit dans les foules ! Les familles de malades ont bien assez à faire avec leur proche ! Quant aux institutions, ayons la décence de penser que plus de moyens permettraient plus de soins... et non pas ce qui est fait, c'est-à-dire le contraire !
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