Les Russes s'offrent Opel

Publié le par sceptix

AUTOMOBILE. Lié à General Motors, le constructeur allemand était menacé de faillite. Cette acquisition, menée avec un équipementier canadien, pose bien des questions



L'Allemagne a poussé hier un soupir de soulagement en apprenant qu'« Opel est sauvé », mais nombre d'analystes étaient réservés quant aux perspectives offertes par les repreneurs, l'équipementier canadien Magna adossé à des capitaux d'État russes. « Tout cela semble reposer sur des bases bien fragiles. Disons qu'il y a 60 à 70 % de chances que ça ne marche pas », tranchait hier un spécialiste du monde de la banque.

Menacé par une faillite pure et simple, le constructeur automobile allemand a été sauvé à l'issue d'une négociation nocturne marathon entre vendredi et samedi. Opel risquait d'être entraîné dans la culbute de son ex-propriétaire, le groupe américain General Motors. GM, qui fut pendant soixante-dix-sept ans le numéro un mondial de l'automobile, devrait déposer son bilan demain (1).

Des buts politiques

Après plusieurs jours de discussions tendues avec le Trésor américain et GM, le gouvernement allemand a annoncé dans la nuit de vendredi à samedi un accord pour la cession d'Opel à l'équipementier canadien Magna, adossé au constructeur automobile russe GAZ et à la banque russe Sberbank. Berlin a promis 1,5 milliard d'euros de crédits publics d'urgence.

GM emploie en Europe 55 000 personnes, près de la moitié en Allemagne, mais aussi au Royaume-Uni, en Belgique, en Espagne et en Pologne, sans oublier sa filiale suédoise Saab, déjà en faillite et que GM cherche à vendre.

En s'engageant pour sauver Opel, la Russie s'offre une chance de relancer sa propre industrie automobile, mais elle mise gros dans cette affaire qui servira de test de sa fiabilité aux yeux des Occidentaux. Les efforts d'expansion en Europe de grandes compagnies russes ont été vus d'un mauvais oeil ces dernières années, le Kremlin étant soupçonné de poursuivre des buts politiques.

Les experts s'interrogent également sur le rôle de GAZ, contrôlé par l'oligarque Oleg Deripaska et lourdement endetté. En 2006, GAZ a acheté la société britannique LDV mais a annoncé début 2009 qu'il allait la vendre à une compagnie malaisienne.

GAZ a également lancé la production d'une nouvelle voiture basée sur la vieille plate-forme de Chrysler acquise en 2006. « Je ne comprends pas ce qu'ils vont faire avec les usines en Allemagne », dit un analyste.

Selon lui, GAZ ferait mieux d'acheter des technologies et de résoudre ses propres problèmes avant de se porter à la rescousse d'Opel.

10 % des effectifs en moins

Cela étant, l'accord signé offre une opportunité aux Russes de relancer leur industrie automobile à moindre coût. « Ils viennent d'acheter un des constructeurs européens les plus avancés technologiquement », confie un connaisseur.

Quant à Magna, il réalise son rêve de devenir un constructeur à part entière. Son idée : partir à la conquête des marchés émergents, au premier rang desquels la Russie.

Reste à connaître le nombre d'emplois menacés par l'opération. Magna a déjà prévenu qu'il comptait supprimer 10 % des effectifs allemands, soit 2 500 personnes, sans fermeture d'usine. Dans toute l'Europe, environ 11 000 postes seraient menacés.

À quatre mois des élections législatives allemandes, la chancelière Angela Merkel respire. La note aurait pu être beaucoup plus sévère.

(1) Chrysler, autre groupe américain en grande difficulté, devrait être prochainement vendu à un consortium mené par Fiat.

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