Draquila - L'Italie qui tremble
La critique d'Excessif

La voix de l'opposition italienne
On connaît Sabina Guzzanti pour son documentaire prônant la liberté d'expression en Italie (Viva Zapatero!) et ses émissions télévisées satiriques. Provoquer les réactions et créer la polémique avec sincérité et mordant est devenu sa marque de fabrique. Avec Draquila - L'Italie qui tremble, elle se sert de la tragédie d'Aquila pour servir la tête d'Il Cavaliere sur un plateau d'argent sale. Son documentaire devient un pamphlet vigoureux et débordant d'humour contre le règne d'un homme sans foi ni loi, malaxant les lois de son pays à loisir pour sauver ses fesses. Ce film est essentiel parce qu'il est la seule voix de l'oppostion politique italienne actuellement.
Cet homme, c'est Silvio Berlusconi : monstre politique des temps modernes qui vampirise l'électorat italien via ses chaînes de télévision. Ce bougre là a du sang sur les mains et de l'argent plein les poches. Il est d'une vulgarité sans nom, écrasé par le poids des scandales et parvient tout de même à rester populaire pour une poignée de citoyens. On en vient à penser qu'il n'y pas plus grand séisme que lui. Des tentes du camp d'Aquila où sont parqués des centaines de désoeuvrés à l'organisation du G8, en passant par l'oppression de la Protection Civile, le documentaire dépeint une conspiration alarmante. Le constat est amer et implacable. Lorsque le puzzle prend enfin forme, on est au bord de l'écoeurement. On croyait tout savoir sur Silvio Berlusconi. Il faut tout repenser en pire.
La mise en image se permet des partis pris graphique tout à fait en accord avec les débordements du Président du Conseil. L'enquête devient parfois hystérique dans ses effets mais permet d'illustrer des informations nécessaires à la bonne compréhension des machinations en place. Sans temps mort, la réalisatrice nous convie à une valse aux temps multiples, passant en revue les errances du gouvernement et le désespoir naissant des habitants d'Aquila privés de leurs demeures. L'auteur n'oublie pourtant jamais d'aborder le contrepoint et propose des discours de pro-berlusconien qui y croient encore. Des paroles à la gloire de leur idole qui ressemblent à un lavage de cerveau en bonne et due forme. En évitant le racolage gluant et l'omniprésence de sa propre personne, Sabina Guzzanti évite l'effet Michael Moore, et propose un point de vue à juste distance. A l'arrivée, le message est clair : même si on annonce la fin de la "dictature", l'Italie n'a pas fini de trembler.
Nicolas SCHIAVI