Kouchner : "Karzaï est corrompu, OK, mais il est notre homme"

Afghanistan: Kouchner dit Karzaï "corrompu", s'interroge sur l'engagement de l'Allemagne

AFP - 6 nov.

PARIS — Le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner a déclaré que le président afghan Hamid Karzaï était "corrompu" mais que les Occidentaux devaient "le légitimer", selon des propos rapportés jeudi par plusieurs journaux.

Dans ces déclarations, faites lors d'un entretien avec des journaux étrangers, Bernard Kouchner s'interroge également sur la cohérence de l'action de l'OTAN et sur les conditions d'engagement des soldats allemands en Afghanistan qui "ne sont pas là-bas pour se battre".

"Karzaï est corrompu, OK", a dit Bernard Kouchner, ajoutant que la corruption était endémique en Afghanistan, selon le New York Times et l'International Herald Tribune (IHT), qui relatent certaines déclarations du ministre français au style indirect. Mais "il est notre homme", a-t-il ajouté. "Nous devons le légitimer", a-t-il encore estimé.

Hamid Karzaï a été réélu à la tête de l'Afghanistan après le retrait de son adversaire Abdullah Abdullah du second tour de l'élection présidentielle, qui devait se tenir le 7 novembre.

Sans démentir ces déclarations, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Bernard Valéro, a indiqué jeudi que Bernard Kouchner s'était entretenu la veille avec Hamid Karzaï pour le féliciter et l'assurer que "la France se tenait aux côtés des Afghans dans cette phase essentielle pour la vie démocratique du pays".

Lors de cette conversation, le ministre français a déclaré qu'"il faut rassembler tous les Afghans de bonne volonté pour construire un État de droit, stable et pacifique", a dit le porte-parole.

"Le second message, c'est que les Afghans attendent des progrès concrets dans leur vie de tous les jours et dans la bonne gouvernance. Le président Karzaï s'est également engagé sur ce point", a-t-il ajouté.

Le porte-parole a indiqué que Bernard Kouchner se rendrait à Kaboul pour la cérémonie d'investiture du président afghan.

Lors de cet entretien avec des journalistes, le chef de la diplomatie française a également déploré l'absence de concertation entre alliés de l'Otan en Afghanistan, et même parmi les pays de l'Union européenne qui y sont engagés.

"En Europe, nous agissons, nous nous battons, nous allons à la guerre, mais nous ne nous parlons pas, et cela est bien dommage", a-t-il dit. Il a ajouté que, selon lui, l'Alliance atlantique "ne fonctionne pas du tout" en Afghanistan. "Quel est le but ? Quel est le chemin ? Et au nom de quoi ?", s'est-il interrogé, selon le New York Times.

Bernard Kouchner a dit apprécier la nouvelle stratégie américaine en Afghanistan, insistant davantage sur les aspects civils de l'intervention internationale, mais il pose également la question: "Où sont les Américains ? Cela commence à être un problème", avant d'ajouter: "Nous avons besoin de nous parler".

Selon le Financial Times, Bernard Kouchner a également pointé les règles d'engagement des soldats allemands en Afghanistan. "Leurs soldats ne sont pas là-bas pour se battre", a-t-il dit. "Nous devons égaliser les politiques d'engagement" a-t-il précisé, ajoutant que "c'est le point de départ d'une position européenne".

Le porte-parole français a cependant précisé jeudi que "chaque Etat détermine ses propres règles d'engagement". "C'est un sujet dont nous parlons. Ces règles évoluent pour renforcer la cohérence de notre action collective", a dit Bernard Valéro.
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