Nouveau gouvernement grec, nouveau Mordorandum ?
Entre 11 et 14 milliards d’euro d’économie pour 2013 et 2014 : c’est ce que la troïka (BCE, UE, FMI) avait demandé au lendemain du vote du dernier mordorandum le 12 février dernier. 52% des grecs ont voté ce dimanche 17 juin contre les cures d’austérité. La majorité de la population -qui a voté- donc. Mais le jeu des 50 sièges de bonus généreusement offerts au vainqueur des élections permet à la Nouvelle Démocratie d’obtenir 129 sièges au lieu de 79, quand le Syriza en obtient 71.
Le gouvernement qui semble se dessiner est une coalition entre la Nouvelle Démocratie de Samaras (la droite historique, qui, contrairement à la définition de « Centre droit » donnée par Y. Calvi hier soir dans C dans l’Air, a fait un virage à la droite de la droite), le PASOK (parti socialiste historique en chute libre avec 12%) de Venizelos et la Gauche Démocratique (centre gauche, stable) de Kouvelis.
Cette coalition rassemblerait 179 sièges sur 300. Une majorité faible qui se heurtera à une opposition forte. Kouvelis a par ailleurs indiqué qu’il refuserait la nomination comme ministres des anciens membres du LAOS(extrême droite) fraîchement arrivés dans le parti de la Nouvelle Démocratie depuis le mois de février/mars. Mais il a assuré son soutien dans la participation au gouvernement.
Qu’en est-il de la renégociation des mordorandum ? Si le SYRIZA a toujours été clair sur cette question et a mené l’ensemble de sa campagne sur ce sujet, c’est beaucoup plus mitigé en ce qui concerne les partis historiques. Car d’un côté, il sera difficile de faire avaler la pilule de la poursuite de l’austérité au malade en phase terminale, mais de l’autre, Venizelos et Samaras ont été dans l’obligation de signer un agrément assurant la poursuite des mesures en cas de victoire électorale pour obtenir une tranche d’aide en mars. Agrément qu’aucun autre parti, dont la Gauche Démocratique n’a paraphé.
Si Samaras a, pendant toute la campagne, assuré qu’il renégocierait certaines clauses (mais a surtout parlé immigration et « c’est la faute de Syriza »), quel est le niveau de probabilité que la troïka accepte une renégociation quand un « pacte » empêche tout retour arrière ? L’histoire récente a déjà montré que la négociation avec la troïka est rarement en faveur du pays « occupé ». D’autant que les premiers commentaires allemand et français vont bien dans le sens de la poursuite des mesures. Et quelle est la réelle volonté de Samaras de vraiment renégocier les mesures maintenant qu’il est officiellement élu ? D’autant que les taux historiquement hauts de l’Espagne et de l’Italie ne vont pas vraiment aller dans le sens de moins d’austérité. D’autant que dès le lendemain des élections, Samaras a assuré qu’il remplirait les engagement de la Grèce. Peu d’espoir donc.
Le constat risque donc d’être amer pour une population qui subit depuis 2 ans les conséquences de l’austérité, et depuis des décennies la politique des partis … historiques et corrompus… qui vont … rester … au pouvoir. Mais l’ensemble de l’Europe semble être soulagée : la Grèce « restera bien dans la zone euro », les grecs ont « bien » voté. Samaras va sans doute tenter de gagner un peu de temps, peut-être en repoussant le futur mordorandum. Mais l’austérité a peu de chance de se réduire.
Le problème grec est loin d’être résolu. Dans quelques jours, le 28 juin prochain, la Grèce fêtera le début de la « guerre » entre le gouvernement et son peuple. Les 28 et 29 juin 2011, les forces de l’ordre avaient envoyé 2800 bombes lacrymogènes -en partie périmées- sur une population indignée et très majoritairement pacifique. L’ »anniversaire » de ces violences aura lieu dans 8 jours. Et depuis quel changement ? Aucun. Une misère visible partout. Les mêmes partis au pouvoir. La même pression de l’extérieur.
Les élections étaient un combat entre la peur et la colère. La peur a gagné, mais la colère pourrait regagner la rue si l’austérité se poursuit.
Si, un changement : un des nombreux sdf de la place Omonia qui a perdu une de ses jambes pendant l’austérité à cause de la lèpre risque de perdre la deuxième.
Et le prochain mordorandum, si il est mis en place, fera des coupes lui aussi, mais dans les budgets … de la santé ?