DES SOCIETES DE SURVEILLANCE PRIVEES FONT LE BOULOT DE LA POLICE
Sous-traiter le sale boulot à l’étranger et au secteur privé. Tel est, en substance, le tour de passe-passe réalisé par le gouvernement français dans sa chasse aux migrants. L’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) et le Réseau éducation sans frontières (RESF) décortiquent le phénomène par un cas pratique édifiant. Le 22 mars, à l’occasion d’une escale à Ouagadougou, la compagnie Air Burkina demande aux passagers qui ont embarqué une heure plus tôt à Bamako (Mali) de présenter leurs pièces d’identité. À la police ? Non, aux agents de sécurité d’une société privée qui viennent de monter dans l’avion. Trois d’entre eux s’attardent sur les passeports des passagers africains. Le responsable du contrôle met en doute l’authenticité de la carte de résident d’un commerçant. Le ton monte. L’agent de sécurité répond que pour tout passager non admis sur le territoire à l’arrivée par la police aux frontières, la France facture 5 000 euros à la compagnie. « Air Burkina préfère ainsi débarquer les personnes sur lesquelles elle a un doute, quitte à leur repayer ultérieurement un billet pour Paris si les passeports s’avéraient finalement authentiques », résument l’Anafé et RESF. Ce soir-là, les agents de sécurité font descendre trois hommes de l’avion pour « vérification des documents ». Selon un membre du personnel de bord, « s’il y a plus de dix non-admis sur un vol, il ne rapporte plus rien financièrement à la compagnie ». L’Anafé et RESF s’inquiètent de « ce phénomène d’externalisation de la politique répressive de pays comme la France, confiée au bon vouloir de personnels qui ne devraient pas pouvoir se substituer à la police ». Et les associations de dénoncer « cette volonté de renforcer le contrôle des flux migratoires au détriment de la protection et de l’accueil des étrangers et en particulier des demandeurs d’asile ».
Anafé, 01 43 67 27 52, www.anafe.org