La Ligue arabe sous influence, et pas de l’opinion arabe !

Publié le par Charlotte sceptix

 

Par Louis Denghien,

Nabil al-Arabi, secrétaire général de la Ligue arabe : pas forcément le porte-voix d'inquiétudes exclusivement arabes...

Nabil al-Arabi, secrétaire général de la Ligue arabe : pas forcément le porte-voix d'inquiétudes exclusivement arabes...

Après les Etats-Unis, l’Union européenne, la Turquie, l’ONU, c’est au tour de la Ligue arabe de faire des remontrances à Damas : dimanche 28 août, celle-ci a exhorté, depuis Le Caire, le gouvernement syrien à mettre fin au « bain de sang« . Les mots, dans ce contexte, ne sont pas innocents et force est de constater que la Ligue reprend ceux des Américains et des cyber-dissidents.

Certes, les ministres des affaires étrangères des 22 pays arabes précisent dans leur communiqué qu’ils ne veulent pas d’une révolution en Syrie : « Le conseil (de la Ligue arabe) souligne que la stabilité de la république arabe syrienne est l’un des principaux facteurs de la stabilité du monde arabe et de l’ensemble de la région« . Dont acte, mais en joignant sa voix au « choeur des vierges démocrates » de Washington, Londres, Paris, Bruxelles, la Ligue arabe  envoie justement un signe d’encouragement aux déstabilisateurs – intérieurs et extérieurs – de la Syrie ! Ce au moment où Bachar engage de vraies réformes et où le mouvement de contestation se marginalise.

Vous avez dit « opinion arabe » ?

Là où les ministres réunis au Caire se moquent quelque peu du monde en général et des Syriens en particulier, c’est quand ils expliquent que « la Ligue arabe subit les pressions de l’opinion publique arabe pour accomplir d’avantage d’efforts (pour influencer Damas) » L’opinion arabe  ? On n’a pas eu vent de manifestations de masse, au Maroc, au Liban, en Egypte, en Irak ou en Algérie pour exiger le départ de Bachar al-Assad. L’opinion arabe ? Laquelle, celle des royautés et émirats du Golfe alliés à Washington et où l’opposition a essentiellement le droit de se taire, sous peine de répression comme au Bahrein ? Celle des Yéménites en révolte ouverte, massive et ininterrompue  contre le prête-nom local des intérêts américains ? A moins qu’il ne s’agisse de ces « plusieurs centaines de militants pro-démocratie » qui, selon Reuters, ont manifesté sous les fenêtres de la Ligue au Caire…

Nous qui voyons le mal – et les Américains – presque partout, nous avons des raisons de penser que la Ligue arabe subit effectivement des pressions, mais pas des Arabes !

La Ligue a, par ailleurs, annoncé l’envoi de son secrétaire général, l’Egyptien Nabil al-Arabi, à Damas. M. al-Arabi sera, c’est certain, reçu courtoisement et écouté attentivement par le président syrien – comme l’avait été récemment le ministre turc des Affaires étrangères. Il est non moins certain que Bachar al-Assad lui fera valoir que d’autres que ses soldats et ses policiers ont des responsabilités dans le « bain de sang« , que d’importantes et difficiles réformes sont amorcées, et que la politique de la Syrie ne se décide ni à New York ni même au Caire. Mais sans doute les hiérarques de la Ligue arabe sont-ils déjà au courant.

D’autant que le représentant syrien au sein de la Ligue, Youssef Ahmad, a eu l’occasion de rappeler aux ministres tout ce qu’on sait sur les groupes armés, qui ont tout de même tué, selon Ahmad, 600 policiers et militaires, et en ont blessé près de 2 000, évaluations guère supérieures à celles concédées par les opposants de l’OSDH. Le représentant syrien a affirmé que la direction politique avait répondu par une série de mesures et de lois nouvelles aux « justes revendications » du « mouvement de protestation populaire« . Nous avons dit plus haut que les mots, en politique, ne sont pas innocents : ceux de Youssef Ahmad montrent que le pouvoir syrien ne nie pas les réalités, ne pratique pas cet autisme politique dont l’accusent ses détracteurs. Et que Bachar al-Assad n’est pas un Staline arabe.

« La Syrie ne sera jamais l’arène d’un conflit entre ses fils ni un théâtre pour l’ingérence étrangère » a ajouté le représentant syrien. Il y a eu cependant, hélas, amorce d’un tel conflit en Syrie. La faute à certaines frustrations sociales, à des maladresses certaines et à certains comportements de caciques du régime (dont plusieurs ont déjà été démis par Bachar). La faute aussi aux agitateurs, armés de fusils d’assaut ou d’ordinateurs, intérieurs ou extérieurs, qui ont tout fait depuis six mois pour faire dégénérer les manifestations, exacerber les failles communautaires et religieuses de la société syrienne, pour le plus grand profit, non des Syriens, mais des puissances qui veulent casser la Syrie, après avoir cassé l’Irak ou la Libye. Et ça aussi, les hommes de la Ligue le savent très bien !

 

 

 InfoSyrie

 

 

 

 

 

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