Sarkozy rattrapé par son passé

Publié le par sceptix

Suite à la mort récente de dix jeunes soldats français dans le bourbier afghan, accusé d’avoir embarqué la France dans une guerre illégale en Afghanistan, et illégitime contre le terrorisme dit et supposé "global", le président Sarkozy a commémoré lundi 25 août le massacre de 124 civils par des soldats allemands, soixante-huit ans plus tôt, lors du jour de la libération de Paris.

Tel un ovni débarquant sur la planète France, Nicolas Sarkozy n’a ainsi pas hésité à accuser les institutions françaises précédentes, de faute morale, quant à la non-commémoration, jusqu’alors, de ce massacre.

Le président Sarkozy serait-il donc plus moral que ses prédécesseurs ? Aurait-il une éthique qu’aucun des présidents français jusqu’alors depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale n’aurait jamais eue ? Pouvons-nous le croire quand il affirme que la guerre au terrorisme doit continuer, sous-entendant un appui inconditionnel à la politique états-unienne jusqu’à présent menée suite aux attentats du 11-Septembre ?

Plusieurs éléments semblent indiquer le contraire. En effet, dans l’
émission Le Dessous des cartes, sur le terrorisme "global" ou "local", le spécialiste Jean-Christophe Victor est clair : le concept même de terrorisme global ou de guerre contre la terreur qui est défendue par l’administration américaine est faux, cela se veut une idéologie mobilisatrice, mais c’est inadapté et comme pensée politique et comme stratégie militaire. On ne peut pas vouloir faire en même temps la guerre à Al-Qaïda, aux talibans, au Hezbollah et à l’Iran en pensant qu’il s’agit du même ennemi, et c’est pourtant bien la position adoptée et par l’administration américaine et par le service de communication élyséen incarné par Sarkozy, prônant notamment l’idéologie d’une famille occidentale dont les intérêts communs prévaudraient au reste du monde... Et malgré cela, des journalistes opèrent dans leur entreprise de véritables propagandes de guerre, à l’image de cette édito vidéo de Christophe Barbier, au regard duquel on peut se demander mais quelle légitimité peut-on bien donner à une moralité encourageant les actes de guerre et ces crimes associés ? La guerre a-t-elle jamais créé la paix, et d’autant plus lorsqu’elle est clairement basée et de manière documentée sur de fausses idéologies ? La légitimité même de la guerre dans le monde, légalisée par des conventions, n’est-elle même pas elle-même à questionner ?

Et par ailleurs, la moralité de M. Sarkozy est-elle à ce point extraordinaire pour tenir des discours aussi moralisateurs que celui tenu à Maillé en Indre-et-Loire, ce lundi ? Un président qui récemment accusait les responsables militaires d’
amateurisme, ou qui ne cachait pas sa nervosité lors du discours d’honneur aux soldats morts pour la France en Afghanistan, aurait-il une relation bien saine avec ce corps de métier ? Il semble effectivement que le rapport du chef de l’Etat français à l’armée soit assez paradoxal. En effet, à plusieurs reprises, y compris pendant la campagne présidentielle de 2007, le président Sarkozy, alors candidat, expliquait que son grand-père maternel avait combattu pour la France pendant la Première Guerre mondiale. Or, une investigation journalistique professionnelle dément ces informations dans un livre autobiographique publié en septembre 2006 : Les Sarkozy, une famille française de Pascal Nivelle et Elise Karlin aux Editions Calmann-Levy.

Oui, je suis un enfant d’immigré, fils d’un Hongrois, petit-fils d’un Grec né à Salonique, qui s’est battu pour la France pendant la Première Guerre mondiale.

Nicolas Sarkozy, 10 avril 2007, Tours, meeting d’avant premier tour de l’élection présidentielle.

J’ai été élevé par mon grand-père, je l’aimais passionnément. Il avait fait la Première Guerre, et il avait eu peur, lui le Juif de Salonique, de la Seconde Guerre mondiale.

Nicolas Sarkozy, 3 mai 2006.

Elise Karlin, alors journaliste à L’Express, et Pascal Nivelle, correspondante en Chine pour le journal Libération, relataient dans leur livre d’investigation une information complètement différente concernant Bénédict Mallah, grand-père maternel de l’actuel président de la République. En effet, selon cette enquête réalisée à partir d’interviews de la famille Sarkozy,
page 64, le grand-père maternel du président de la République n’a pas servi pour l’armée française lors de la Première Guerre mondiale, car échappant à la mobilisation de justesse en tant que soutien de famille.

Un président qui aurait menti sur les services d’armes de son grand-père aurait-il la légitimité de faire la morale sur des services de faits d’armes, ou aux militaires engagés malgré eux dans des conflits dont les intérêts en jeu sont loin d’être clairs ? Interrogé par mail sur cette contradiction officielle, le service de communication des Editions Calmann-Lévy n’a pas souhaité donner suite à la confirmation de cette contradiction flagrante entre le discours du candidat Sarkozy et ces informations, pas plus que les auteurs concernés. Il est à noter toutefois que l’une des deux journalistes, Elise Karlin, a depuis été nommée journaliste pour le magazine politique
Entre les lignes, sur la chaîne Public Sénat.

Les interventions de Nicolas Sarkozy du 3 mai 2006 et du 10 avril 2007 sont disponibles à cette
adresse

http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=43629
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article